Théorie des groupes/Sous-groupes de Z, divisibilité dans N et dans Z
Rappels de terminologie
[modifier | modifier le wikicode]Rappelons que si a et b sont des nombres naturels, on dit que a divise b, ou encore que a est (un) diviseur de b, ou encore que b est divisible par a, ou encore que b est (un) multiple de a, s'il existe un nombre naturel c tel que b = ac. On écrit souvent pour exprimer que a divise b. La relation «divise» est une relation d'ordre dans N. Si un nombre naturel a divise un nombre naturel b et que b n’est pas nul, alors pour la relation d'ordre usuelle dans N.
Si a et b sont maintenant des entiers rationnels, nous dirons de même que a divise b, ou encore que a est (un) diviseur de b, ou encore que b est divisible par a, ou encore que b est (un) multiple de a, s'il existe un entier rationnel c tel que b = ac. On vérifie facilement que si a et b sont naturels, a divise b selon la seconde définition si et seulement s'il le divise suivant la première. La relation «divise» est une relation de préordre dans Z. (Elle est réflexive et transitive, mais non antisymétrique, deux éléments de Z se divisant l'un l'autre si et seulement s'ils sont égaux ou opposés.)
Sous-groupes de Z
[modifier | modifier le wikicode]Rappelons qu'un groupe est dit monogène s'il est engendré par un seul élément. Nous avons vu que le sous-groupe (monogène) d'un groupe G engendré par un élément a de G est l’ensemble des éléments de G de la forme , n parcourant .
Soit a un entier relatif. Le sous-groupe de engendré par a est l’ensemble des éléments de de la forme na avec . Puisque la multiplication dans est commutative, c’est aussi l’ensemble des éléments de de la forme an avec . Nous noterons le sous-groupe de engendré par . Pour exprimer que deux éléments x, y de sont congrus modulo le sous-groupe a de , ce qui revient à dire que la différence de x et y est divisible par a, nous écrirons . Il est clair que si a = 1, alors a = 1 = , donc est monogène, avec l'élément 1 pour générateur. Nous allons montrer que tous les sous-groupes de sont du type a, autrement dit sont monogènes.
Soit n un nombre naturel > 0. Les n éléments r de tels que forment une transversale du sous-groupe de , autrement dit un système de représentants de pour la relation d'équivalence .
Pour une démonstration, voir par exemple « Division euclidienne », dans la leçon « Arithmétique ».
Prouvons d’abord l’existence de a. Si H est nul, notre thèse est vraie avec a = 0. Nous pouvons donc supposer H non nul. Alors H comprend un élément n tel que n < 0 ou n > 0. Si n < 0, alors -n, qui appartient lui aussi à H, est > 0. Donc H comprend au moins un élément > 0. Soit a le plus petit entier naturel > 0 appartenant à H; prouvons que H = a. Puisque a appartient à H, a est contenu dans H (minimalité du sous-groupe engendré). Prouvons l'inclusion réciproque . Soit b un élément de H; il s'agit de prouver que b appartient à a. Nous avons vu que b (comme tout élément de ) est congru modulo a à un nombre r parmi . Nous avons alors r = b - na, avec . Puisque b appartient à H par hypothèse et que, comme nous l'avons vu, est contenu dans H, r appartient à H. Si r n'était pas nul, la minimalité de a serait contredite (puisque ), donc r est nul, donc l'égalité r = b - na donne b = na, donc b appartient à a comme annoncé.
Nous avons donc prouvé l’existence d'un a tel que dans l'énoncé. Prouvons son unicité. Soit un nombre naturel tel que ; il s'agit de prouver que . On peut dire par exemple que et sont deux entiers naturels multiples l'un de l'autre dans et que, comme on le montre facilement, deux entiers naturels ne sont multiples l'un de l'autre dans que s'ils sont égaux. On peut aussi régler à part le cas où H est nul et noter que si H n’est pas nul, alors, d’après un corollaire ci-dessus, a est l'indice de H dans , d'où l'unicité de a.
Théorèmes de divisibilité dans N et dans Z
[modifier | modifier le wikicode]Plus grand commun diviseur
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Soit une famille non vide (finie ou infinie) d'entiers rationnels. Il existe un et un seul nombre naturel d qui est diviseur commun des et multiple de tous leurs diviseurs communs, autrement dit : tel que les diviseurs communs des soient exactement les diviseurs de d.
Ce théorème repose uniquement sur la caractérisation ci-dessus des sous-groupes de (Z, +). C'est donc un cas particulier de la caractérisation du plus grand commun diviseur dans un anneau principal (voir « PGCD, PPCM », dans la leçon « Anneau »).
Remarque. Si d n’est pas nul, c'est-à-dire si les ne sont pas tous nuls, d est aussi le plus grand des diviseurs naturels communs des pour la relation d'ordre usuelle dans .
Soit une famille non vide d'entiers rationnels, on appelle plus grand commun diviseur — en abrégé pgcd — des , et l'on note , l'unique nombre naturel qui divise tous les nombres et est multiple de tous leurs diviseurs communs.
Soit une famille non vide d'entiers rationnels, et d leur pgcd. Il existe des entiers rationnels , nuls sauf un nombre fini d'entre eux, tels que .
C'est à nouveau un cas particulier des propriétés du pgcd dans un anneau principal (voir « Identité de Bézout », dans la leçon « Anneau »).
Soient a ≠ 0 et b deux nombres naturels et d leur pgcd. Il existe des nombres naturels x et y tels que ax – d = by.
Si b = 0 alors d = a, donc x = 1 convient (avec y arbitraire). Si b ≠ 0 , appliquons le théorème de Bachet-Bézout : il existe des entiers rationnels u et v tels que au – d = bv. Pour tout entier n, en posant x = u + nb et y = v + na, on obtient ax – d = au – d + nab = bv + nab = by. De plus, puisque a et b sont supérieurs ou égaux à 1, x et y sont positifs si l'on choisit n ≥ max(|u|, |v|).
On dit que deux entiers rationnels a et b sont premiers entre eux (ou encore que l'un est premier avec l'autre) s'ils n'ont pas d’autre diviseur naturel commun que l'unité.
Cela revient évidemment à dire que a et b n'ont pas d’autre diviseur commun dans que 1 et –1. Il est clair que cela revient aussi à dire que le pgcd de a et b est égal à 1.
Soit une famille non vide d'entiers rationnels. On dit que ces nombres sont :
- premiers entre eux dans leur ensemble si le seul nombre naturel qui les divise tous est 1 ;
- premiers entre eux deux à deux si pour tous indices et distincts, et sont premiers entre eux.
Soient a et b deux nombres naturels, d leur pgcd. Alors a = da' et b = db', où a' et b' sont des nombres naturels premiers entre eux.
Si a et b sont tous deux nuls alors d = 0 ; on peut faire a' = b' = 1 et l'énoncé est vrai dans ce cas.
Sinon, voir Arithmétique/PGCD#Nombres premiers entre eux.
Soient a et b deux entiers rationnels premiers entre eux. Si c est un entier rationnel tel que a divise bc, a divise c.
On le déduit facilement du théorème de Bachet-Bézout (voir « Théorème de Gauss » dans la leçon « Arithmétique »).
Soient a, b1, ... , bn des entiers rationnels. Si a est premier avec chacun des nombres b1, ... , bn, il est premier avec leur produit.
Cf. « Corollaire », dans la leçon « Anneau ».
Plus petit commun multiple
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Soit une famille (finie ou infinie) d'entiers rationnels. Il existe un et un seul nombre naturel m qui est multiple commun des et divise tous leurs multiples communs, autrement dit : tel que les multiples communs des soient exactement les multiples de m.
De même que précédemment pour le pgcd, c'est ici un cas particulier de la caractérisation du plus petit commun multiple dans un anneau principal (voir « PGCD, PPCM », dans la leçon « Anneau »).
Soit une famille d'entiers rationnels, on appelle plus petit commun multiple des , en abrégé ppcm des , et l'on note , l'unique nombre naturel qui est multiple de tous les et divise tous leurs multiples communs.
Remarque. Le produit d'une famille finie (a1, ... , an) étant un multiple commun de a1, ... , an, il est multiple de leur ppcm.
Les et les ont mêmes multiples communs.
Si a1, ... , an sont des nombres naturels premiers entre eux deux à deux, leur ppcm est leur produit.
Voir Arithmétique/Exercices/Divers#Exercice 11-8.
Voir Anneau (mathématiques)/Exercices/Exercices#Exercice 4.
Voir Arithmétique/PPCM.
Soient a et b deux nombres naturels non nuls. Si a et b ne sont pas premiers entre eux, ppcm(a, b) < ab.
Si a et b ne sont pas premiers entre eux, leur pgcd d est >1. D'après le théorème précédent, ppcm(a, b) = a b / d, donc ppcm(a, b) < ab.
Nombres premiers
[modifier | modifier le wikicode]On appelle nombre premier un nombre naturel > 1 qui n'a pas d’autre diviseur (dans N) que lui-même et l'unité.
Soit p un nombre premier. Un entier rationnel a est premier avec p si et seulement s'il n’est pas divisible par p.
Soit d le pgcd de a et p. C'est un diviseur de p donc il est égal à soit à 1, soit à p.
Si p divise a alors d = p donc d ≠ 1 (autrement dit : a n'est pas premier avec p).
Réciproquement, si d ≠ 1 alors d = p, or d divise a, donc p divise a.
Soient p un nombre premier, a et b des entiers rationnels. Si p divise ab, il divise a ou b. Plus généralement, si p divise un produit d'entiers rationnels, il divise au moins un des facteurs.
On le déduit du lemme de Gauss ci-dessus, via le corollaire qui le suit : cf. « Lemme d'Euclide », dans la leçon « Anneau ».
Tout nombre naturel non nul est le produit d'une famille finie de nombres premiers. Cette famille est unique à l’ordre près.
Cf. « Décomposition en facteurs premiers », dans la leçon « Arithmétique ».
L'anneau Z/nZ
[modifier | modifier le wikicode]Dans cette section, on supposera connus les premiers éléments de la théorie des anneaux, y compris les notions d'idéal, d'anneau quotient et de corps.
On a vu au chapitre Groupes, premières notions que l'addition et la multiplication usuelles dans Z font de Z un anneau commutatif (non nul) admettant 1 pour unité et que, plus précisément, cet anneau est intègre. Puisque tout sous-groupe du groupe additif Z est de la forme nZ pour un certain élément n de Z, tout sous-groupe du groupe additif Z est un idéal de l'anneau Z. Donc les idéaux de l'anneau Z sont exactement les sous-groupes du groupe additif Z. Comme tout quotient d'un anneau commutatif par un idéal, le quotient Z/nZ se munit d'une structure d'anneau, l'addition étant la loi du groupe quotient (que nous avons déjà rencontrée) et la multiplication (notée par juxtaposition) pouvant se caractériser par la relation
Il nous arrivera de noter [x] la classe d'un entier rationnel modulo n (n étant sous-entendu dans la notation [x]). La relation ci-dessus peut alors s'écrire
Si r et a sont des entiers rationnels, on a
Soit n un nombre naturel; il est clair que l'anneau Z/nZ admet pour unité l'élément 1 + nZ et est nul si et seulement n = 1.
Soient n un nombre naturel et X une classe résiduelle modulo n, autrement dit un élément de Z/nZ. Les trois conditions suivantes sont équivalentes :
1° tout élément de X est premier avec n.
2° X comprend un entier rationnel premier avec n;
3° X est un élément inversible de l'anneau Z/nZ.
Si a est un entier rationnel, a + nZ est un élément inversible de l'anneau Z/nZ si et seulement si a est premier avec n.
Démonstration. Il est banal que 1° entraîne 2°. Supposons 2° vraie et prouvons 3° Puisque 2° est vraie, X est de la forme x + nZ, où x est premier avec n. D'après le théorème de Bézout, il existe des entiers rationnels a et b tels que ax + bn = 1. En passant aux classes modulo n, nous trouvons [x] [a] = [1]. Puisque [x] est égal à X, il en résulte que X est inversible, ce qui prouve 3°. Enfin, supposons 3° et prouvons 1°. Soit x un élément de X, il s'agit de prouver que x est premier avec n. Nous avons X = [x]. Puisque 3° est satisfaite, X admet un inverse, que nous pouvons noter [a] pour un certain entier rationnel a. Alors [x] [a] = [1], donc xa - 1 est divisible par n. Soit xa - 1 = yn, avec y entier. Tout diviseur commun à x et à n divise xa - yn, autrement dit divise 1, donc x est premier avec n, ce qui prouve 1°. Ainsi, les conditions 1° à 3° sont équivalentes. La dernière assertion de l'énoncé s'en déduit facilement.
Soit n un nombre naturel. L'anneau Z/nZ est un corps si et seulement n est un nombre premier.
Démonstration. Si n est premier, tout entier rationnel non divisible par n est premier avec n, ce qui, d’après le théorème précédent, revient à dire que tout élément non nul de l'anneau Z/nZ est inversible, donc cet anneau (non nul, puisque n > 1) est un corps. Réciproquement, supposons que l'anneau Z/nZ soit un corps et prouvons que n est un nombre premier. Puisqu'un corps a toujours au moins deux éléments, n est distinct de 1. D'autre part, Z/0Z est isomorphe à Z, qui n’est pas un corps, donc n est distinct de 0. Ainsi, n > 1. Puisque l'anneau Z/nZ est un corps, tout élément non nul de cet anneau est inversible, donc tout nombre naturel non divisible par n est premier avec n. Supposons que, par absurde, n ne soit pas un nombre premier. On a donc n = ab, où a et b sont des nombres naturels tous deux > 1. Alors a n’est pas divisible par n et n’est pas premier avec n, ce qui amène une contradiction.
Si p est un nombre premier, le corps est souvent noté . On prouve facilement qu'entre deux corps à p éléments, il existe un et un seul isomorphisme. Pour cette raison, on dit volontiers « le corps à p éléments ».