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Théorie des groupes/Produit direct et somme restreinte

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Produit direct et somme restreinte
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Chapitre no 9
Leçon : Théorie des groupes
Chap. préc. :Action de groupe
Chap. suiv. :Groupes linéaires

Exercices :

Produit direct et somme restreinte
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Théorie des groupes/Produit direct et somme restreinte
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Sauf mention contraire, les lois de groupe seront notées multiplicativement. Quand il sera question de plusieurs groupes, il nous arrivera de désigner leurs éléments neutres par le même symbole 1, ce qui, en pratique, ne prête pas à confusion.

Produit direct de deux groupes

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Soient et deux groupes. Désignons par leur produit cartésien (ou, plus exactement, le produit cartésien de leurs ensembles sous-jacents). Il est naturel de définir sur une loi de composition composante par composante :

,

le produit apparaissant dans le second membre étant calculé dans et le produit dans . On vérifie facilement que cette loi de composition munit d'une structure de groupe. Ce groupe est appelé produit direct (ou simplement produit) des groupes et et noté . Si et désignent respectivement les éléments neutres de et de , l'élément neutre de est . Le symétrique d'un élément de est l'élément .

L'application définit un isomorphisme de sur (« commutativité » du produit direct) et l’application définit un isomorphisme de sur (« associativité » du produit direct).

Produit direct d'une famille de groupes

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En théorie des ensembles, on emploie le mot « famille » dans deux sens légèrement différents[1].

Dans le premier sens, une famille est un graphe fonctionnel. Si on voit un graphe fonctionnel comme une famille et que désigne la première projection de ce graphe, on désigne la famille en question par , où désigne l'unique élément tel que le couple appartienne au graphe L'ensemble est alors appelé l'ensemble des indices de la famille en question. Nous dirons aussi que cette famille est indexée par .

Dans le second sens, on définit une famille d'éléments d'un ensemble E comme une application dont l'ensemble d'arrivée est E.

Dans le présent chapitre, nous emploierons le mot « famille » dans son premier sens. Par exemple, quand nous considérerons une famille de groupes, nous ne nous soucierons pas d'un ensemble dont chaque soit élément.

La définition qu'on a donnée plus haut du produit direct de deux groupes se généralise comme suit à une famille quelconque de groupes.


Il est clair que cette loi de composition est bien une loi de groupe.

Remarque. Les notations ne sont pas tout à fait fixées. L'emploi ci-dessus du symbole est conforme à Bourbaki[2], à J.J. Rotman[3], à D.S. Dummit et R.M. Foote[4] etc. Kurzweil et Stellmacher[5] notent ou encore ou encore le produit direct d'une famille finie de groupes. Ils n'emploient le symbole que pour désigner des opérations internes à un groupe[6]. W.R. Scott, Group Theory, 1964, réimpr. Dover, 1987, pp. 14-15 (exemples 11 et 12), désigne par le produit direct d'une famille de groupes.

Somme restreinte d'une famille de groupes

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Dans le produit direct , considérons les éléments possédant la propriété suivante : l’ensemble des éléments i de I tels que (où 1 désigne le neutre de ) est fini. Ces éléments de , appelés familles de support fini, forment un sous-groupe de .

Remarque. La définition qui précède est conforme à la terminologie de Bourbaki[7]. Là où nous disons « somme restreinte », de nombreux auteurs disent « somme directe », même s'il s'agit de groupes non commutatifs[8].

Si l’ensemble I est fini, la somme restreinte et le produit direct coïncident. Dans la suite de ce chapitre, nous ne nous intéresserons plus au produit direct.

Inclusions canoniques. Soient une famille de groupes et S sa somme restreinte externe. Pour chaque élément i de I, désignons par l’application de dans S qui à l'élément x de fait correspondre la famille dont la i-ème valeur est x et dont les autres valeurs sont 1. Nous définissons ainsi un homomorphisme injectif de dans S. Cet homomorphisme est appelé i-ème inclusion canonique de dans S. L'image de par est isomorphe à et on l'identifie souvent à , disant par exemple que est un sous-groupe de S. Pour la clarté de ce premier exposé, nous éviterons cet abus de langage.

On vérifie facilement que les sous-groupes de S sont distingués et qu’ils ont deux à deux des intersections réduites à l'élément neutre de S.

Soient i et j deux éléments distincts de I. Tout élément de commute avec tout élément de . En effet, les produits et sont tous deux égaux à la famille dont la i-ème composante est x, la j-ème composante y et dont les autres composantes sont égales à 1. (L'hypothèse est essentielle dans le cas où les ne sont pas supposés commutatifs.)

De façon générale, si G est un groupe, si est une famille finie d'éléments de G qui commutent deux à deux, on peut définir le produit de cette famille d'éléments de G sans se préoccuper d'un ordre dans l’ensemble J, car, vu la commutativité, le produit est indépendant de l’ordre choisi. Il est clair qu'on peut de même définir le produit d'une famille même infinie d'éléments de G qui commutent deux à deux si l’ensemble des i tels que est fini. Avec cette définition, tout élément de S est le produit de la famille d'éléments de S. En particulier, les engendrent S.

Projections canoniques. Soit une famille de groupes. Pour tout élément de , l'application est un homomorphisme de (somme restreinte externe) dans (Vérification facile.) Cet homomorphisme est surjectif, car pour tout élément de Gj, est l'image de par (Autrement dit, ) L'homomorphisme est appelé la j-ième projection canonique (ou simplement la j-ième projection) de sur

Début d’un théorème
Fin du théorème

Si tous les groupes sont abéliens alors leur somme directe l'est aussi, et le théorème ci-dessus fournit la propriété universelle de la somme directe externe :

Propriété universelle de la somme directe externe. Soient une famille de groupes abéliens, K un groupe abélien et une famille d'homomorphismes. Il existe un et un seul homomorphisme f de dans K tel que, pour tout élément j de I, , où désigne, comme plus haut, la j-ième inclusion canonique. Cet homomorphisme f applique la famille sur

Dans le langage de la théorie des catégories, la propriété universelle de la somme directe d'une famille de groupes abéliens revient à dire que si est une famille de groupes abéliens, le groupe et, dans les notations ci-dessus, la famille d'homomorphismes constituent une somme (on dit aussi un « coproduit ») de la famille dans la catégorie des groupes abéliens[9]. Nous avons ainsi prouvé que les sommes existent dans la catégorie des groupes abéliens. Nous verrons dans un chapitre ultérieur (Produit libre d'une famille de groupes) que les sommes existent aussi dans la catégorie des groupes[10].

Début d’un théorème
Fin du théorème

La démonstration, facile, est laissée au lecteur.

Des remarques faites plus haut sur la structure de la somme restreinte externe nous suggèrent la définition suivante :


Il revient au même de dire que pour tous éléments distincts i et j de I, chaque élément de commute avec chaque élément de et que tout élément de G peut s'écrire d'une et une seule façon , la famille étant une famille de support fini telle que pour tout i[11].

Début d’un théorème
Fin du théorème

Donnons encore deux autres caractérisations de la somme restreinte interne. Le lecteur pourra les démontrer à l'aide de la remarque qui précède et du fait (démontré dans Exercices/Sous-groupe distingué et groupe quotient) que si deux sous-groupes normaux ont une intersection réduite à l'élément neutre, tout élément de l'un commute avec tout élément de l'autre.

Début d’un théorème
Fin du théorème


Début d’un théorème
Fin du théorème

Cette dernière caractérisation est utile comme condition suffisante pour que G soit somme restreinte interne des Gi.

On vérifie facilement que la somme restreinte externe est somme restreinte interne de la famille (où, comme plus haut, désigne la i-ième inclusion canonique de dans la somme restreinte externe).

Si l’ensemble I est fini, on remplace souvent l’expression « somme restreinte interne » par « produit direct interne », ou « produit direct », ou « produit ». Plutôt que de dire qu'un groupe est produit direct interne d'un couple (H, K) de ses sous-groupes, on préfère dire qu’il est produit direct interne de H et de K, etc.

Projections de la somme restreinte interne. Soit un groupe, somme restreinte interne d'une famille de sous-groupes. Pour tout élément j de I, on appelle j-ième projection de G sur Gj (relativement à la famille ) l’application de G dans Gj qui, pour tout élément x de G, applique x sur l'élément xj de Gj apparaissant dans l'unique expression de x sous la forme avec pour chaque i. Il est clair que cette projection est un homomorphisme de dans . Elle est d'ailleurs égale au composé désigne l'isomorphisme canonique de G sur et où, comme plus haut, désigne l'homomorphisme de (somme restreinte externe) sur Gj. On a vu que l'homomorphisme de sur Gj est surjectif, donc la j-ième projection de G sur Gj, étant égale à , est un homomorphisme surjectif. Il est d'ailleurs clair que tout élément de Gj est sa propre image par la j-ième projection de G sur Gj .

Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème

La démonstration, facile, est laissée au lecteur.

Nous avons vu que si est une famille de groupes et une famille telle que, pour tout i, Hi soit un sous-groupe de , alors la somme restreinte externe des Hi est un sous-groupe de la somme restreinte externe es Gi. Une version interne de ce théorème (si un groupe G est somme directe interne d'une famille de sous-groupes, si pour tout i, désigne un sous-groupe de , alors le sous-groupe engendré par les est somme directe interne des ) peut s'obtient comme cas particulier du théorème suivant :

Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème

Démonstration laissée au lecteur.

Début de l'exemple
Fin de l'exemple



D'après la « commutativité » et l'« associativité » de la somme restreinte interne, il est clair que si un groupe G est somme restreinte interne d'une famille (Hi)i de sous-groupes, chaque Hi est facteur direct de G.

Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème

Dans les hypothèses et notations du théorème qui précède, nous dirons parfois que est la somme restreinte (somme directe dans le cas commutatif) de la famille (ou des ). Il est clair que si les sont des isomorphismes, la somme restreinte des a pour isomorphisme réciproque la somme restreinte des

Début d’un théorème
Fin du théorème

Voici une version interne de ce théorème :

Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème

Remarques.

  • Le corollaire qui précède nous servira dans l'étude des groupes nilpotents finis.
  • Dans la démonstration de ce corollaire, on aurait pu éviter le raisonnement par récurrence en utilisant le fait que si G est un groupe et K1, K2, ... , Kn des sous-groupes distingués finis de G, l'ordre de K1 K2 ... Kn divise le produit des ordres des Ki. (Voir « formule du produit » au chapitre Classes modulo un sous-groupe.)
Début de l'exemple
Fin de l'exemple


Début d’un théorème
Fin du théorème

Facteurs directs d'un groupe abélien

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Cette section peut être omise en première lecture.

Les groupes supposés abéliens seront notés additivement.

Dans un groupe abélien G, tous les sous-groupes sont normaux, ce qui entraîne que si H et K sont des sous-groupes de G, le sous-groupe de G engendré par H et K est H + K. Dès lors, d'après le théorème 4 (ou encore le théorème 18) :

Début d’un théorème
Fin du théorème

Si G est un groupe (non forcément abélien), si H et K sont des sous-groupes de G, la condition « HK = G » est symétrique en H et K (passer aux inverses). Donc la condition «  et » est symétrique en H et K.


Le théorème 21 peut alors se formuler comme suit :

Début d’un théorème
Fin du théorème


Début d’un théorème
Fin du théorème
Début d’un théorème
Fin du théorème

Remarques.

  1. L'équivalence des conditions (i) à (iv) (mais non (v)) sera généralisée dans le chapitre Théorie des groupes/Produit semi-direct.
  2. On utilisera le théorème qui précède dans un futur chapitre (non encore publié) sur les groupes abéliens libres.

Notes et références

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  1. N. Bourbaki, Théorie des ensembles, Hermann, 1970, p. II.14.
  2. Algèbre, ch. 1, § 4, déf. 12, p. 43.
  3. An Introduction to the Theory of Groups, 4e édition, tirage 1999, p. 308.
  4. Abstract Algebra, Wiley, 2004, p. 157.
  5. The Theory of Finite Groups, An Introduction, Springer, 2004, p. 27.
  6. Ouvr. cité, p. 28.
  7. N. Bourbaki, Algèbre, ch. I, § 4, no 9, Paris, 1970, p. 46.
  8. Voir par exemple P. Tauvel, Algèbre, seconde édition, Dunod, 2010, p. 50.
  9. Voir S. Lang, Algèbre, Paris, Dunod, 2004, pp. 39 et 137.
  10. S. Lang, Algèbre, 3e éd., Paris, Dunod, 2004, p. 74.
  11. N. Bourbaki, Algèbre, ch. I, § 4, nos 8 et 9 ; Paris, 1970, pp. 45-46.
  12. N. Bourbaki, Éléments de mathématique, Algèbre, ch. I, § 4 ; Paris, 1970, p. 45.
  13. N. Bourbaki, Algèbre, I, Chapitres 1 à 3, Paris, 1970, ch. 1, § 4, no 9, prop. 15, p. 46.