Espace vectoriel/Dimension
On a considéré des familles libres, des familles génératrices et on a défini une base comme une famille à la fois libre et génératrice. Tout comme dans le cas général des modules, on peut considérer des parties libres et des parties génératrices d'un espace vectoriel. On peut aussi considérer des parties basiques d'un espace vectoriel, c'est-à-dire des parties à la fois libres et génératrices. Ces parties basiques sont généralement appelées elles aussi des bases. Pour les détails, le lecteur peut se reporter au chapitre Module sur un anneau/Définitions.
Soient E et F deux -espaces vectoriels.
Existence de bases
[modifier | modifier le wikicode]Soient G une partie génératrice de E et L une partie libre. Alors il existe G' ⊂ G\L tel que L∪G' soit une base de E.
En particulier :
- (cas G = E) toute famille libre de E peut être complétée en une base de E ;
- (cas L = ∅) de toute famille génératrice de E on peut extraire une base de E.
L'ensemble P des parties F de G\L telles que L∪F soit libre est inductif pour l'inclusion : il est même stable par unions de chaînes. Le lemme de Zorn s'applique et donne l'existence d'un élément G' maximal dans P. Alors, la partie libre B = L∪G' est aussi génératrice. En effet, G est génératrice, or tout vecteur g de G s'exprime comme une combinaison linéaire de vecteurs de B puisque si ce vecteur n'est pas déjà dans B, il forme avec B une partie liée (si g n'est pas combinaison linéaire d'éléments de B, il n'est à fortiori pas combinaison d'éléments de G' partie de B, G'∪{g} serait donc libre, ce qui est contraire à la maximalité de G').
- E admet une base.
- Si E admet une partie génératrice finie alors il admet une base finie.
Tout sous-espace vectoriel de admet un supplémentaire tel que .
En d'autres termes, S est le supplémentaire de V ssi tout vecteur de E se décompose de façon unique comme la somme de vecteurs de chacun des sous-espaces V et S.
Dimension
[modifier | modifier le wikicode]Soit V un espace vectoriel (à gauche ou à droite) sur un corps K. Toutes les bases de V ont même cardinal.
Si V admet une base infinie, l'énoncé est un cas particulier d'un théorème général relatif aux modules. (Voir Module sur un anneau/Définitions#Modules libres et de types finis.) On peut donc supposer que toutes les bases de V sont finies. Dans ce cas, l'énoncé est démontré à l'aide du théorème de Jordan-Hölder (pour les groupes à opérateurs) dans Théorie des groupes/Groupe à opérateurs#Exemple d'utilisation.
La démonstration qui précède repose sur le théorème de Jordan-Hölder. Toujours dans le cas où toutes les bases de V sont finies, voici une démonstration qui ne repose pas sur le théorème de Jordan-Hölder.
Soient E un espace vectoriel (à gauche ou à droite) sur un corps K et un nombre naturel (). Si sont des vecteurs (non forcément distincts deux à deux) engendrés par des vecteurs (non forcément distincts deux à deux), alors la famille est liée.
(Le lecteur est invité à traiter le cas en « éliminant » , puis à déduire, toujours par « élimination » d'un , le cas du cas Cela le mettra sur la voie de la démonstration générale et lui permettra de la retrouver facilement de mémoire.)
On pourrait commencer par démontrer l'énoncé dans le cas où E est un espace à gauche; on passerait aux espaces à droite en appliquant le premier résultat au corps opposé de K. Pour mieux mettre en lumière les éléments essentiels de la démonstration, nous allons plutôt traiter simultanément les espaces à gauche et les espaces à droite en tenant compte des deux faits suivants :
- 1° si E est un espace vectoriel à gauche ou à droite, si et sont des scalaires et un vecteur, alors il existe un scalaire tel que
- (on peut prendre égal à si E est un espace à gauche et prendre égal à si E est un espace à droite);
- 2° si E est un espace vectoriel à gauche ou à droite, et des vecteurs et un scalaire non nul tel que , alors
Si , est engendré par la famille vide de vecteurs et est donc nul, donc la famille (d'un seul vecteur) est liée, donc l'énoncé est vrai dans le cas
Supposons que et que
- (hypothèse de récurrence) l'énoncé soit vrai avec au lieu de ;
nous allons prouver que
- (thèse 1) l'énoncé est alors vrai pour ,
ce qui prouvera l'énoncé général par récurrence sur
Soient des vecteurs engendrés par des vecteurs Nous avons donc des relations
- (2,1)
- (2,n+1),
où les sont des scalaires.
Si les sont tous nuls, les vecteurs sont tous nuls et la famille est donc certainement liée (puisqu'elle est non vide). On peut donc supposer que les ne sont pas tous nuls. Quitte à changer la numérotation des et des , on peut supposer que
La relation (2, n+1) donne alors (que E soit un espace à gauche ou à droite)
d'où (que E soit un espace à gauche ou à droite)
- (3)
pour certains scalaires
En portant (3) dans les relations (2,1) à (2,n), nous trouvons, pour tout dans ,
Sonc (que E soit un espace à gauche ou à droite) il existe, pour chaque dans , un scalaire et des scalaires tels que
Les vecteurs (pour ) sont donc engendrés par les vecteurs , donc, par hypothèse de récurrence, la famille est liée, c'est-à-dire qu'il existe des scalaires non tous nuls tels que
Que E soit un espace à gauche ou à droite, nous avons donc une relation
pour un scalaire
Puisqu'un au moins des scalaires est non nul, cela montre que la famille est liée. Nous avons donc prouvé notre thèse (1), d'où l'énoncé.
Remarque. On trouvera un résultat un peu plus précis que le précédent sur la page Espace vectoriel/Exercices/Rang, dimension (lemme de Steinitz, exercice 2-1).
Si maintenant et sont deux bases finies d'un même K-espace vectoriel (à gauche ou à droite), les sont engendrés par les Si on avait , alors, d'après le lemme qui précède, les seraient liés, ce qui est faux, puisqu'ils sont supposés former une base. Donc et, de même, , donc , ce qui prouve que toutes les bases finies d'un même K-espace vectoriel sont équipotentes. On sait déjà (voir Module sur un anneau/Définitions#Modules libres et de types finis) que si un A-module (à gauche ou à droite) admet une base infinie, toutes ses bases sont équipotentes, donc nous avons démontré que, dans tous les cas, toutes les bases d'un même K-espace vectoriel sont équipotentes.
Soit V un espace vectoriel (à gauche ou à droite). Le cardinal de toute partie génératrice de V est supérieur ou égal au cardinal de toute partie libre de V.
Soient X une partie génératrice de V et L une partie libre de V. D'après le théorème de la base incomplète (cas particuliers), X contient une base X' de V et L est contenue dans une base L' de V. D'après le théorème qui précède, X' et L' ont même cardinal. Puisque X contient X' et que L est contenue dans L', le cardinal de X est donc supérieur ou égal à celui de L, ce qui démontre l'énoncé.
Le cardinal commun des bases d'un K-espace vectoriel E est appelé la dimension de E, et est noté .
Par exemple, la dimension de {0} est 0.
Par exemple, si E est de dimension finie , alors il est isomorphe à .
Soit M un module libre sur un anneau commutatif non nul A. Toutes les bases de M sont équipotentes.
Soient et deux bases du A-module M. Il s'agit de prouver que
- (thèse 1)
D'après le (cas particulier du) théorème de Krull (Anneau (mathématiques)/Définitions), nous pouvons choisir un idéal maximal J de A.
Pour tout élément de M, désignons par l'image de par l'homomorphisme canonique de M sur M/JM.
D'après un théorème démontré dans le chapitre Anneau (mathématiques)/Définitions,
- (2) l'anneau quotient A/J est un corps.
D'autre part, d'après un théorème démontré dans Module sur un anneau/Définitions#Passage d'un A-module à un module sur un anneau quotient de A,
- les familles et sont des bases du (A/J)-module M/JM, autrement dit, d'après (2), des bases du (A/J)-espace vectoriel M/JM.
On a vu que toutes les bases d'un même espace vectoriel sont équipotentes, donc , ce qui prouve notre thèse (1) et donc l'énoncé.
Dimension d'une somme
[modifier | modifier le wikicode]- Si F est un sous-espace vectoriel de E, alors .
- Si E est de dimension finie et si F est un sous-espace de même dimension, alors F = E.
Si E et F sont des sous-espaces d'un même espace vectoriel alors