En raison de limitations techniques, la typographie souhaitable du titre, «
Devoir : Constructions de mesures
Théorie de la mesure/Devoir/Constructions de mesures », n'a pu être restituée correctement ci-dessus.
1°) Restriction d'une mesure extérieure en une mesure sur une sous-tribu.
Soient
une tribu sur un ensemble
, et
une « mesure extérieure » sur
, c'est-à-dire une application de
dans
telle que :
- i)
;
- ii)
est croissante :
;
- iii)
est dénombrablement sous-additive :
.
(
est donc « presque » une mesure sur
).
a) Montrer que pour tous
,
.
On pose
.
b) Montrer que les
tels que
appartiennent à
.
c) Soient
. Montrer que pour tout
,
.
d) Montrer que
est une algèbre sur
.
e) Soient
, disjoints deux à deux. On pose
et
.
Pour tout
, montrer que
(
), et en déduire que
.
f) En déduire que
et que pour tout
,
.
g) En déduire que
est une sous-tribu de
et que la restriction de
à
est une mesure (
-additive).
Solution
(Dans tout ce paragraphe on utilisera constamment — implicitement — le fait que
est une tribu).
a) Pour
, et
, (iii) et (i) donnent :
.
b) Pour tout
on a, d'après (ii) :
(
), d'où, si
:
.
c) Remarquons d'abord que vu (a), un élément
de
appartient à
si et seulement si :
.
Pour
et
on a donc :
- puisque
,
, et
- puisque
,
.
d) D'après (i) et (b),
est non vide.
Vue sa définition,
est stable par complémentaire.
Soient
, montrons que
.
Pour tout
on a, d'après (c) :
.
Comme
, la somme du premier et du troisième terme vaut
et celle du deuxième et du quatrième vaut
. Comme
, la somme des quatre termes est donc égale à
, d'où le résultat.
e) Remarquons que pour
et
disjoints, l'égalité de (c) se simplifie en :
.
Ceci permet de montrer
par récurrence sur
(en utilisant que
est l'union disjointe de
et de
).
On a donc :
. D'après (ii) on en déduit
,
et ce pour tout
, d'où le résultat.
f) D'après (iii),
, d'où (d'après (e))
, et ce pour tout
, donc
.
Pour tout
, en appliquant (e) à
, on trouve aussi que
, d'où l'égalité d'après (iii).
g)
est une sous-algèbre de
stable par réunion dénombrable disjointe, donc une sous-tribu.
Sur
,
est
-additive d'après (f) appliqué à
(ou à
).
2°) Un
sur les compacts donne un
sur les ouverts.
Soient
un espace localement compact (c'est-à-dire un espace topologique dans lequel tout point admet un voisinage compact), et
l'ensemble de ses compacts. (C'est une généralisation du cas
où
est l'ensemble des fermés bornés de
). Les propriétés utiles seront, si
est un compact de
:
- i) pour tout compact
,
est compact ;
- ii) pour tout ouvert
,
est compact et
est ouvert ;
- iii) de tout recouvrement ouvert de
on peut extraire un sous-recouvrement fini : si
avec
ouverts, il existe
fini
tel que
;
- iv) il existe un ouvert
de
, contenant
, et inclus dans un compact.
Soit
, croissante, et telle que
, et même,
- si
alors
(en particulier,
).
Pour tout ouvert
de
on pose :
.
Montrer que :
a)
et
est croissante, à valeurs dans
;
b) si
est inclus dans un compact,
est fini ;
c)
(
ouverts) (indication : pour tout compact
on posera
et
) ;
d)
(pour toute suite d'ouverts
) ;
e) pour tout compact
inclus dans
,
.
Solution
a) Pour
,
(compact), donc
. Si
alors
, d'où
.
De ces deux propriétés on déduit que pour tout ouvert
,
.
b) Si
est inclus dans un compact
alors, pour tout compact
on a
donc
, d'où
.
c) Soient
ouverts de
. Soit
un compact dans
, posons
et
(compacts d'après (ii)).
De
on déduit
.
D'autre part,
et
donc
et
.
On a donc
pour tout compact
inclus dans
, d'où
.
d) On déduit d'abord de (c) (par récurrence) que
.
Soient
et
un compact inclus dans
. D'après (iii), il existe un entier
tel que
, donc tel que
. Vue la déduction préliminaire on
obtient donc
.
Par conséquent,
pour tout compact
inclus dans
, d'où
.
e) Soit
un compact inclus dans l'ouvert
. Alors
est disjoint de
donc
, et
est un compact inclus dans
donc
. On a donc
pour tout compact
, d'où le résultat (par définition de
).
3°) Ce
sur les ouverts se prolonge en une mesure extérieure, qui donne une mesure sur les boréliens
À partir du
de la question 2 on pose, pour toute partie
de
:
.
Montrer que :
a) pour tout ouvert
,
;
b) sur la tribu
,
est une mesure extérieure (c'est-à-dire vérifie les hypothèses de
la question 1) ;
c) pour tout compact
,
;
d) pour qu'une partie
de
appartienne à la sous-tribu
(définie dans la question 1), il suffit que
pour tout ouvert
,
;
e) si
est ouvert alors
;
f)
contient la tribu des boréliens sur
.
Solution
a)
est le plus petit ouvert contenant
donc (par croissance de
)
.
b) En particulier (d'après 2.a)
.
Si
alors
donc
:
est croissante, donc à valeurs dans
puisque
.
Il reste à montrer que
pour
.
Si l'un des
est infini, c'est évident. Sinon, soit
.
Pour tout
, par définition de
, il existe un ouvert
tel que
d'où (en sommant et en appliquant 2.d) :
, avec
.
Mais
est un ouvert contenant
donc
. Par conséquent,
, et ce pour tout
, donc
.
c) Soit
un compact. Pour tout ouvert
contenant
,
par définition de
. Donc
par définition de
.
D'autre part, d'après 2.iv et 2.b, il existe un ouvert
tel que\break
, ce qui revient à dire que
.
d) Supposons que pour tout ouvert
,
. Soit
une partie quelconque de
. Pour tout ouvert
, on en déduit :
(d'après 3.a et 3.b), d'où (par définition de
) :
.
e) Supposons
ouvert. D'après (d) et (a) il suffit de montrer que pour tout ouvert
,
, autrement dit : que pour tout ouvert
et tout compact
,
. Pour cela il suffit de remarquer que
est un ouvert contenant
et d'appliquer 2.e.
f) Résulte du fait que
est une tribu sur
(1.g) contenant les ouverts (3.e).
4°) Régularité de cette mesure.
Par construction (et d'après 3.a), toute partie
de
est « extérieurement régulière », c'est-à-dire vérifie :
.
On dira que
est de plus « intérieurement régulier » si
.
Montrer que :
a) tout ouvert est intérieurement régulier ;
b) si
et
est inclus dans un compact
, alors
est intérieurement régulier (utiliser
que
est extérieurement régulier) ;
c) plus généralement, si
et
, alors
est intérieurement régulier (utiliser (a) et (b)).
Solution
Remarquons que pour tout
, par croissance de
, on a déjà
.
est donc intérieurement régulier si et seulement si l'inégalité inverse est vérifiée.
a) D'après 3.a si
est ouvert,
, et d'après 3.c
. (Remarque : cette démonstration ne suppose pas que
soit fini).
b) Supposons
,
compact, et
. Par croissance de
et d'après 3.c,
, donc pour tout
il existe un ouvert
tel que
autrement dit (d'après 1.g et 3.f) tel que
. Soit
: c'est un compact inclus dans
, et
donc
, donc
.
D'où
, et ce pour tout
, ce qui prouve que
.
c) Soit
de mesure finie, c'est-à-dire inclus dans un ouvert
tel que
. Pour montrer que
est intérieurement régulier il suffit, comme dans (b), de montrer que pour tout
, il existe un compact
tel que
. Pour cela, on choisit d'abord (en utilisant a) un compact
tel que
donc (d'après 1.g et 3.f) tel que
. Puis (en appliquant (b) à
) on trouve un compact
inclus dans
(donc dans
) tel que
. Mézalor,
est inclus dans la réunion de ces deux ensembles de mesure
, d'où le résultat.
ÉPILOGUE
Dans ce problème, à partir d'un
(vérifiant les hypothèses de la question 2), on a construit un
qu'on a étendu en une mesure
sur les boréliens de
(vérifiant des propriétés supplémentaires). Cette construction classique (
donne
) permet, pour de bons choix de
, de démontrer (pour
localement compact) :
- sur l'espace des fonctions continues de
dans
nulles hors d'un compact, toute forme linéaire positive
est de la forme
pour une certaine mesure
(qui dépend bien sûr de
).
C'est le théorème de représentation de Riesz.
Pour cela, on choisit
convenablement en fonction de
.
- si
est muni d'une structure de groupe (non nécessairement commutatif) compatible avec sa topologie, il existe sur
une mesure de Haar à gauche (c'est-à-dire non nulle et invariante par les translations à gauche).
Pour cela, on construit un
non nul invariant par ces translations.
Sur
(ou même
), la mesure de Lebesgue est un cas particulier commun à ces deux applications. (Dans le premier cas, pour
l'intégrale de Riemann, dans le second cas, pour la structure de groupe additif usuelle).