Équation du quatrième degré/Généralités sur les équations du quatrième degré
Ce chapitre est consacré aux généralités sur les équations du quatrième degré. Après avoir défini une équation du quatrième degré, nous nous intéresserons au cas particulier des équations ayant tous leurs coefficients réels. Nous verrons ensuite les relations liant les racines de l'équation aux coefficients de l'équation. Nous aborderons ensuite l'étude du discriminant d'une équation du quatrième degré.
Définition d'une équation du quatrième degré
[modifier | modifier le wikicode]Avant de commencer à manipuler les équations du quatrième degré, nous devons bien savoir ce que c'est.
Une équation du quatrième degré est une équation qui, lorsqu’on a développé, réduit, mis au même dénominateur, multiplié les deux membres par le dénominateur commun et mis tous les termes dans le premier membre, se ramène à l'équation polynomiale du quatrième degré de la forme :
avec, bien sûr, a non nul.
Dans l'intégralité de ce cours, nous supposerons, si rien n'est précisé, que les coefficients de l'équation appartiennent à un ensemble quelconque et en particulier peuvent, par conséquent, être des nombres complexes.
Les équations suivantes sont des équations du quatrième degré.
Essayez pour chaque équation de le montrer, à titre d'exercice.
- .
- .
- .
Équations dont les coefficients sont des nombres réels
[modifier | modifier le wikicode]Dans ce paragraphe, nous étudierons plus particulièrement les équations dont les coefficients sont des nombres réels.
Nous avons le théorème suivant :
Si une équation à coefficients réels :
admet une racine α dans l’ensemble des nombres complexes, alors elle admet aussi comme racine le conjugué du nombre α.
Si α est racine de l'équation :
alors :
- .
Prenons le conjugué des deux membres :
- .
Compte tenu des propriétés du conjugué, on obtient :
- ,
ce qui montre que le conjugué de α est aussi racine de l'équation :
- .
Du théorème précédent, nous en déduisons immédiatement la propriété suivante :
Une équation du quatrième degré à coefficients réels admet :
- soit quatre racines réelles (dont deux, trois ou quatre d'entre elles peuvent être confondues) ;
- soit deux racines réelles (éventuellement égales) et deux racines complexes conjuguées distinctes ;
- soit deux paires (éventuellement égales) de racines complexes conjuguées distinctes.
Somme et produit des racines
[modifier | modifier le wikicode]On appelle monôme en quatre indéterminées, une expression de la forme :
- ,
étant des variables (ou indéterminées) et des entiers naturels fixés (éventuellement nuls).
Un polynôme en quatre indéterminées est une somme finie de monômes en quatre indéterminées.
Dans ce paragraphe ainsi que dans le suivant, le terme « polynôme » devra être compris comme « polynôme à quatre indéterminées ».
Lors de l'étude des équations du second degré et du troisième degré, vous avez dû voir qu’il existe des relations simples donnant la somme et le produit des racines en fonction des coefficients des monômes de l'équation.
Nous allons voir qu’il en est de même pour les équations du quatrième degré.
Nous avons :
Soit :
une équation du quatrième degré dont les quatre racines seront notées .
Nous avons alors les quatre relations simples liant les racines aux coefficients de l'équation :
- ;
- ;
- ;
- .
L'équation peut s'écrire :
- .
En développant, on obtient :
-
- .
En identifiant les coefficients de cette dernière équation avec :
- ,
on obtient les quatre relations annoncées.
Le théorème précédent va nous permettre de calculer certaines expressions portant sur les racines.
Une expression contenant des variables est dite symétrique par rapport à celles-ci si elle est inchangée par toutes les permutations de ces variables.
Les polynômes suivants sont symétriques en les variables :
- ;
- ;
- les sommes de Newton , pour .
Une autre définition :
Les expressions :
sont appelées polynômes symétriques élémentaires en les quatre indéterminées .
Nous avons alors la proposition suivante :
Les sommes de Newton s'expriment comme fonctions (polynomiales et à coefficients entiers) des quatre polynômes symétriques élémentaires en .
Nous avons :
- ;
- ;
- ;
- .
Nous allons ensuite établir une relation de récurrence d'ordre 4 pour pouvoir calculer les pk suivants.
Pour cela, considérons le polynôme (en cinq variables : et ) ainsi défini :
- .
Nous avons alors :
- .
Nous en déduisons, pour tout :
Par addition membre à membre, nous obtenons :
qui est bien une relation de récurrence d'ordre 4.
En résumé, nous retiendrons :
|
Nous voyons que l’on peut ainsi, par récurrence, exprimer tous les pk comme des polynômes à coefficients entiers en .
Cette proposition est généralisée par le théorème suivant :
Tout polynôme symétrique en quatre indéterminées (à coefficients entiers) peut s'exprimer en fonction (polynomiale et à coefficients entiers) des quatre polynômes symétriques élémentaires en ces indéterminées.
Commençons par poser, pour tout quadruplet d'entiers tels que ,
- la somme de tous les monômes de la forme avec , chaque monôme étant pris une seule fois
(même lorsque certaines des inégalités sont des égalités : par exemple si , le monôme n'est compté qu'une fois).
Par exemple :
- ;
- si :
- ,
- ,
- ,
- ,
- en particulier : , , et ;
- si :
- ,
- ,
-
- ;
- si :
-
- .
-
Tout polynôme symétrique à coefficients entiers s'écrit comme combinaison linéaire à coefficients entiers des polynômes Sk,l,m,n. Il nous suffit donc de montrer que ces derniers sont des polynômes à coefficients entiers en σ1, σ2, σ3, σ4.
On procède par induction sur , les quadruplets d'entiers naturels étant munis de l'ordre lexicographique (qui est un bon ordre).
Soit tel que . En posant
- ,
on constate que le polynôme est une combinaison linéaire (à coefficients entiers) de polynômes associés à des quadruplets strictement inférieurs à . Par hypothèse d'induction, est donc un polynôme à coefficients entiers en σ1, σ2, σ3, σ4, donc aussi, ce qui achève la preuve.
Discriminant d'une équation du quatrième degré
[modifier | modifier le wikicode]Pour une équation de degré , le discriminant peut se définir en fonction des racines x1, x2, … , xn par la formule :
- .
Pour une équation du quatrième degré, cette définition se réécrit :
Le discriminant Δ d'un polynôme de degré 4
de racines est défini par :
- .
Nous observons que l’expression donnant le discriminant est un polynôme symétrique par rapport aux racines de l'équation. Nous en déduisons que le discriminant doit pouvoir s'exprimer simplement par rapport aux coefficients de l'équation. En particulier, il doit être réel si les coefficients le sont.
Nous avons en effet le théorème suivant :
Nous admettrons ce théorème dont la démonstration est très fastidieuse (mais pas très compliquée). Nous avons fait une démonstration similaire pour les polynômes du troisième degré et nous avions vu qu'elle était assez courte. Pour le quatrième degré, les calculs sont beaucoup plus longs. Ils sont faits dans la leçon Résultant.
Nous remarquons que le discriminant du quatrième degré contient 16 termes, ce qui peut paraître beaucoup. On peut toutefois remédier à ce désagrément en posant la définition suivante :
On appellera sottien de l'équation :
l'expression que l’on notera Ψ et que l’on définira par :
- .
On peut alors simplifier l’expression du discriminant grâce au théorème suivant :
Il suffit de développer le second membre pour constater qu’il est bien égal au discriminant.
D'après le théorème qui précède, nous voyons que le discriminant des équations à sottien nul aura le même signe que l’expression :
- ,
qui pourra alors servir de discriminant de substitution.
Les équations à sottien nul seront étudiées plus en détail dans les chapitres suivants.
Le discriminant, pour un polynôme de degré 4, rend les mêmes services que pour un polynôme de degré 3. La principale propriété est exprimée par ce qui suit :
Soit :
une équation à coefficients réels et Δ son discriminant.
- si Δ > 0, l'équation possède quatre racines distinctes qui soit sont toutes réelles, soit forment deux paires de nombres complexes conjugués.
- si Δ = 0, l'équation possède soit une ou deux racines doubles, soit une racine triple, soit une racine quadruple.
- si Δ < 0, l'équation possède quatre racines distinctes, dont deux réelles et deux complexes conjuguées.
Notons x1, x2, x3, x4 les racines de l'équation :
- .
Nous raisonnerons sur l’expression de Δ suivante :
- .
Clairement, Δ est nul si et seulement si au moins deux des trois racines sont égales.
Par ailleurs (que les quatre racines soient distinctes ou pas), nous distinguerons trois cas :
Premier cas : les quatre racines sont des nombres réels.
Δ, qui s'écrit :
- ,
est alors le carré d'un nombre réel. Il est donc positif ou nul.
Deuxième cas : deux des quatre racines sont deux nombres complexes conjugués. Les deux autres sont réelles.
Notons les deux racines réelles et les deux autres racines (avec ), et recalculons alors Δ dans ce cas :
Δ est l'opposé du carré d'un nombre réel. Il est donc négatif ou nul.
Troisième cas : deux des quatre racines sont deux nombres complexes conjugués. Les deux autres sont aussi deux nombres complexes conjugués.
Notons ces quatre racines (avec ), et recalculons alors Δ dans ce cas :
Δ est le carré d'un nombre réel. Il est donc positif ou nul.
Comme nous avons distingué tous les cas possibles, nous en déduisons, inversement, les trois points annoncés.
De plus, nous avons redémontré que dans tous les cas, Δ est réel.
Si Δ = 0, on peut apporter plus de précision en considérant l’expression :
- .
Si cette dernière expression est nulle, l'équation à résoudre aura une racine triple ou quadruple. Dans le cas contraire, l'équation aura une ou deux racines doubles. Voir à ce propos l'exercice 2-2 de Recherche:Méthode de Sotta.