Sociologie économique/Introduction
La sociologie économique est une branche de la sociologie qui cherche à comprendre et expliquer sociologiquement les formes d'économie. Elle analyse l’influence des relations sociales concrètes sur la formation des groupes, réseaux et institutions économiques. Elle tente de comprendre les pratiques économiques de toutes organisations sociales. La sociologie économique étudie les faits économiques en les considérant comme des faits sociaux. Elle combine le comportement guidé par l’intérêt avec celui qui dépend des relations entre les acteurs.
Les branches voisines de la sociologie économique sont :
- La socioéconomie qui examine l'évolution économique des sociétés.
- L'économie comportementale qui étudie le comportement des êtres humains dans les situations économiques. Parfois, dans certaines situations, les êtres humains adoptent un comportement qui peut sembler paradoxal.
L’apparition de la sociologie économique date de la période située au tournant des XIXe siècle et XXe siècle.
Certains des auteurs à l’origine de la sociologie économique sont aussi les fondateurs de la sociologie classique et leurs apports sont toujours en prise directe avec la sociologie économique contemporaine.
- - Parmi les auteurs classiques, on peut citer Émile Durkheim, Maurice Halbwachs, Karl Marx, Marcel Mauss, Vilfredo Pareto, Georg Simmel, Max Weber;
- - et parmi les auteurs contemporains, Luc Boltanski, Pierre Bourdieu, Mark Granovetter, Karl Polanyi ...
Les fondements
[modifier | modifier le wikicode]- Karl Marx
Karl Marx (1818-1883) est économiste et sociologue. Dans Le Capital (1867), il affirme que la valeur des marchandises, des objets provient de ce « que dans leur production une force de travail humaine a été dépensée, que du travail humain y a été accumulé. En tant que cristaux de cette substance sociale commune, ils sont réputés valeurs. » La « valeur proprement dite » est ainsi une « réalité purement sociale ». Elle est l’expression d’un « mode de production » dont dépend un « système de division sociale du travail » et un « rapport social » entre les humains.
- Léon Walras
Léon Walras (1834-1910) veut ajouter l'économie politique (comment gouverner, réformer concrètement ?) et l'économie sociale (comment réaliser la justice ?) à l'étude de l'économie et on retrouve ainsi des préoccupations d’ordre sociologiques et politiques.
- Vilfredo Pareto
Vilfredo Pareto (1848 – 1923) a apporté de nombreuses contributions importantes en économie et en sociologie, particulièrement dans l'étude de la distribution du revenu et dans l’analyse des choix individuels. Son apport dans le domaine de la sociologie économique se situe autour des concepts d’actions logiques étudiées à travers l'économie et des actions non-logiques étudiées par la sociologie. Il étudie le comportement humain lors de la recherche du gain maximal. En ajoutant la sociologie à l'économie, la complexification permet de mieux décrire les phénomènes. L'économie pure est une 1e approximation, suivie d’une 2e approximation donnée par l'économie appliquée et enfin complété par la sociologie qui est la dernière approximation.
- Manuel d'économie politique, (1909)
- Traité de sociologie générale, (1917).
- Émile Durkheim
Émile Durkheim (1858 - 1917) est l’un des fondateurs de la sociologie moderne. Il a constitué une équipe pour sa revue “L’année sociologique” qui va donner l' école durkheimienne. Pour Durkheim, la sociologie économique devrait remplacer l'économie politique dont les méthodes sont insatisfaisantes. Les membres les plus connus de l' école durkheimienne sont François Simiand (1873 - 1935), Marcel Mauss (1872 - 1950) et Maurice Halbwachs (1873 - 1945).
- Max Weber
Max Weber (1864 - 1920) a été professeur d’histoire de droit romain et de droit commercial à Berlin puis professeur d'économie politique à Fribourg. Le fait économique est un fait social car la recherche des biens rares oblige à tenir compte des comportements des autres agents. Weber est à l’origine des trois directions de la sociologie économique: analytique, historique et cognitive. Weber considère 4 types d’actions: traditionnelles, affectives, rationnelles en finalité et rationnelles en valeur.
- Georg Simmel
Georg Simmel (1858 - 1918) étudie les formes de l’action réciproque des individus dans la société. Il se considérait avant tout comme un philosophe mais on peut le considérer comme un des fondateurs de la sociologie. Dans son livre Philosophie de l’argent (1900), Simmel analyse la modernité à partir de l’argent considéré comme un «fait social total». Dans ce livre, il part d’un point particulier et limité qui est l’argent pour remonter jusqu'à la société dans son ensemble. La monétisation transforme les liens sociaux mais il explique aussi les transformation sociales indispensables à cette monétisation. Sa réflexion est caractérisée par l’ambivalence et la dualité puisqu’il expose un fait puis en montre les limites. Pour lui, on ne désire pas une chose parce qu'elle est précieuse mais à cause des obstacles qui se présentent pour obtenir cette chose. Simmel parle du superadditum de la richesse qui offre un prestige social. La réflexion de Simmel sur l’argent est une référence en Sociologie économique.
L’encastrement social et La nouvelle sociologie économique
[modifier | modifier le wikicode]- Karl Polanyi
L’anthropologue Karl Polanyi (1886 - 1964) s’est intéressé aux relations entre le système de marchés et la société et a introduit la notion d’encastrement social. Il décrit les processus comme régis par des règles spécifiques à chaque civilisation de par le monde à n’importe quelle époque dans trois grands “modèles” de systèmes économiques :
- La réciprocité = c’est un échange entre deux groupes, une sorte de troc comme le pratiquaient les chasseurs-cueilleurs.
- La redistribution = il consiste en un rassemblement de biens en un centre pour être redistribué en fonction de critères déterminés.
- L’économie d’échange = l’organisation de marchés implique une fluctuation des prix et de nombreuses transactions.
Depuis les travaux de Polanyi, on sait que la relation marchande est inséparable d’une organisation sociale qui la rend possible.
- Mark Granovetter
Mark Granovetter, né en 1943, est un sociologue américain qui est l’un des principaux représentants de la sociologie des réseaux sociaux. Pour Granovetter, les relations économiques ne font pas exception et les « marchés » n’ont pas à être exclus du champ de l’analyse des relations sociales. Il a introduit la notion d’encastrement (embeddedness) qui permet en sociologie économique de concevoir les transactions économiques dans les relations sociales. Granovetter distingue deux sortes d’encastrement : l’encastrement relationnel (les relations personnelles qui influencent l’action), et l’encastrement structural (qui renvoie plus largement aux réseaux auxquels l’acteur prend part). Ce sont ces deux formes d’encastrement qui assurent la continuité des relations entre les individus en leur permettant d’acquérir un socle social commun.
- Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness, (article de 1985)
La sociologie économique contemporaine
[modifier | modifier le wikicode]- Pierre Bourdieu
Pierre Bourdieu (1930-2002) plaidait pour une science économique qui fût une science sociale à part entière. Sa pensée a exercé une influence considérable dans les sciences humaines et sociales. Dans Les Structures sociales de l’économie (2000), il expose les principes d’une sociologie économique concurrente de l’économie. La sociologie économique de Pierre Bourdieu est aussi présente dans La Distinction (1979) avec une théorie de l’orchestration entre l’offre et la demande, dans La Noblesse d’État (1989) avec une analyse des luttes au sein du champ du pouvoir économique, etc ... Il a consacré l’une de ses dernières recherches à la « décision » économique la plus difficile qu’un ménage ait à prendre, l’achat d’un logement.
- voir = Faire de la sociologie économique avec Pierre Bourdieu , Revue Française de Socio-Economie , N° 13 , 2014/1
Notes
[modifier | modifier le wikicode]- Philippe Steiner , La sociologie économique , La Découverte « Repères », 2011