Révolution américaine/Les causes de la Révolution américaine

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Les causes de la Révolution américaine
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Chapitre no 3
Leçon : Révolution américaine
Chap. préc. :Contexte : l'Amérique du Nord au XVIIIe siècle
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La Révolution américaine débute en 1774 ; elle est le résultat d'une accumulation de tensions et de conflits entre les 13 colonies et la métropole, mais aussi au sein des diverses couches sociales. Les évènements qui se succèdent entre 1763 et 1774 indiquent cette montée des mécontentements, sans pour autant prendre un caractère révolutionnaire. Il est donc indispensable d'analyser la série de résistances à la politique britannique, qui forment un contexte prérévolutionnaire d'émeutes sporadiques.

Les causes politiques et idéologiques[modifier | modifier le wikicode]

Frederick North, Premier Ministre anglais tory (1770-1782)

En 1764, à la fin de la guerre de Sept Ans, s'engage une réflexion sur l’empire britannique à son apogée. L'entourage royal et le gouvernement sont alors dominés par les tories qui rêvent d'affermir la domination et la centralisation sur les colonies. Ils se heurtent à l’opposition des whigs favorables à la liberté de commerce. Quant aux Américains, ils ne sont pas prêts à renoncer à leur autonomie politique locale.

Le mercantilisme conduit également les décisions politiques du pays. Il s'agit d'accroitre la dépendance des colonies envers la métropole et d'attirer le plus possible la monnaie. Pour cela, Londres souhaite conserver son rôle de redistribution du commerce maritime. Les tories sont partisans du protectionnisme : taxes imposées aux produits étrangers, droits de douane, monopole et encouragement des compagnies maritimes. Il est également question de combattre le commerce de contrebande entre les 13 colonies et les Antilles françaises ou espagnoles. Cette politique mécontente certains négociants américains.

Les problèmes financiers[modifier | modifier le wikicode]

Il convient ici de rappeler que le budget de l'état est déficitaire après la guerre de Sept Ans. Les mesures fiscales prises par le gouvernement doivent permettre d'augmenter les recettes et de réduire le déséquilibre des finances. Les colons ressentent la pression fiscale comme injuste, d'autant qu’ils ne sont pas représentés au Parlement de Londres.

La question de l'expansion vers l’ouest[modifier | modifier le wikicode]

Les colons empiètent sur les territoires situés à l'ouest des Appalaches, malgré l’interdiction du roi (Proclamation d'octobre 1763).

La présence militaire[modifier | modifier le wikicode]

Après le traité de Paris en 1763, le présence militaire anglaise est ressentie durement par la population. Elle représente en outre une part importante du budget de l'État.

Vers la fin[modifier | modifier le wikicode]

Dans les années qui suivent la guerre de Sept Ans, Londres impose une série de lois (Acts) qui affectent les intérêts des colons. Du côté américain, la résistance s'organise peu à peu en prenant des formes de plus en plus violentes et radicales jusqu'à la guerre.

Chronologie des lois[modifier | modifier le wikicode]

Le roi George III

Le 7 octobre 1763, une proclamation royale fixe les limites orientales des treize colonies. Elle suit l'acquisition des territoires français d'Amérique du Nord perdus par Paris après la guerre de Sept Ans. L'objectif du texte était d'organiser l'empire britannique ainsi que les relations avec les Amérindiens. Cette déclaration de George III et de son conseil interdit aux colons américains de s'installer sur les terres situées à l'ouest des montagnes Appalaches, considérées comme propriété des Amérindiens (« territoire indien »). Le roi prenait ainsi les Amérindiens sous sa protection[1] et Londres espérait ainsi développer le commerce des fourrures avec les tribus. Cependant, plusieurs colons s'étaient déjà implantés dans ces régions et refusaient le monopole royal dans l'acquisition des terres. En fermant la colonisation américaine vers l'ouest, la Grande-Bretagne soulève le mécontentement des fermiers et des propriétaires fonciers, dans un contexte de croissance démographique des 13 colonies.

Le 5 avril 1764, le Parlement anglais vote le Sugar Act ; il s'agit d'une version modifiée du Sugar and Molasses Act de 1733, qui taxait les mélasses étrangères importées dans les 13 colonies. Mais ces taxes n'étaient pas toujours acquittée et Lord George Grenville souhaitait mettre fin aux fraudes et à la corruption. Si le Sugar Act réduit les taxes sur les mélasses, il les étend à d'autres produits (sucre, certains vins, café, piments, batiste, indiennes) et impose une règlementation sur les exportations de bois et de fer[2]. Surtout, le Sugar Act renforce le contrôle anglais sur le commerce colonial, dans la droite ligne du mercantilisme. Il provoque une crise dans la production de rhum et le commerce des colonies, notamment celles de la Nouvelle-Angleterre. Il est très impopulaire auprès des colons[3]. Quelques jours après, le Parlement instaure le Currency Act qui permet à la métropole de mettre la main sur le système monétaire colonial[4].

Le Stamp Act, voté en 1765, instituait un timbre fiscal obligatoire tous les documents, permis, contrats commerciaux, journaux, testaments, livres et cartes à jouer. Elle fut votée afin de couvrir les couts de la présence militaire nécessaire à la protection des colonies et réduire la dette publique anglaise. Le Stamp Act suscita une grande animosité en Amérique car il affectait tous les colons et non plus seulement les marchands. Cette loi avait pour objectif de faire entrer de l’argent directement dans les caisses de l'État. En réalité, elle ne fut guère appliquée en raison des pressions et des résistances des Américains. Les collecteurs de taxe furent en effet menacés d’être passés au goudron et aux plumes (tarring and feathering).

Les taxes pesèrent surtout sur les notaires et les avocats qui utilisaient de nombreux documents. De plus, elles alimentaient directement le budget britannique et n’affectaient plus seulement les échanges commerciaux. L’argent servit à renforcer les garnisons du Fort Detroit et du Fort Pitt. Mais les colons estimaient que ces derniers protégeaient avant tout le commerce des fourrures. De nombreux colons refusèrent de payer les timbres et la situation se radicalisa. À Boston, on pendit et brula une effigie d’Andrew Oliver, un agent du timbre. Sa maison fut pillée et son bureau fut incendié. La demeure du gouverneur du Massachusetts, Thomas Hutchinson fut également vandalisée. Il dut trouver refuge au Fort William avec sa famille.

De nombreuses associations virent le jour afin d’organiser la protestation : elles seront bientôt connues comme les Fils de la Liberté. Des incidents similaires se produisirent à New York et à Charleston. Les timbres furent saisis et détruits, et les agents molestés. Des comités de correspondance (Committees of Correspondence) se constituèrent pour unir les opposants et relayer les appels au boycott des marchandises anglaises.

La chambre des bourgeois de Virginie adopta les résolutions de Patrick Henry sur le Stamp Act (Stamp Act Resolves). Elles déclaraient que les Américains possédaient les mêmes droits que les sujets britanniques, en particulier celui de ne pas être taxé sans le consentement de leurs représentants. Ceux qui soutenaient la prétention anglaise de taxer les Virginiens seraient considérés comme ennemis de la colonie[5]. Le gouverneur Fauquier préféra dissoudre la chambre des bourgeois de Virginie en réaction à ces propositions radicales.

Caricature anglaise sur l'abrogation du Stamp Act

À l'instigation de James Otis, le Massachusetts réclama la tenue d’une assemblée générale intercoloniale. Neuf colonies sur 13 envoyèrent des représentants au Stamp Act Congress qui se tint au Federal Hall de New York du 7 au 25 octobre 1765. Les 27 délégués des colonies adoptèrent une Déclaration des Droits et des Griefs (Declaration of Rights and Grievances) établie par John Dickinson et envoyèrent des lettres ainsi que des pétitions au roi et au Parlement. L’accent était mis sur le Stamp Act mais aussi sur le fait que les colons n’avaient pas le droit de participer à l’élection des députés qui siègent à Londres. Seules les assemblées coloniales avaient le droit de lever de nouvelles taxes en Amérique. Ils critiquaient aussi le recours aux Admiralty Courts pour appliquer le Stamp Act et punir les contrevenants. En réalité, les boycotts eurent plus d’effet que les pétitions, et la loi fut finalement abrogée le 18 mars 1766. Mais la question de la représentation politique des Américains n’était pas réglée. Et la détermination du Parlement de faire payer des taxes aux colons restait intacte.

Le 24 mars 1765, le Parlement édicte un premier Quartering Act (le second sera voté en 1774). Selon les termes de ce texte, les assemblées coloniales devaient pourvoir aux besoins des troupes armées anglaises stationnées à l’intérieur de leurs limites. Il s’agissait d’assurer leur ravitaillement, leur logement et leur transport, à titre gratuit. Pour la Couronne, il était logique que les Américains qui profitaient de la protection de l’armée concourent à l’entretien de celle-ci. Mais les colons estimaient que les dangers n’existaient pas. Ils préféraient les milices aux troupes régulières, car elles n’étaient que temporaires. Ils ne supportaient pas l’idée de devoir entretenir des soldats anglais venus pour faire respecter les lois votées à Londres. La résistance fut la plus forte à New York : l’assemblée refusa de financer les troupes et fut suspendue en représailles.

Les Townshend Acts furent proposés par Charles Townshend, Chancelier de l'Échiquier, et votées par le Parlement en 1767. Ces lois instituaient une taxe sur les matières premières importées dans les colonies américaines, comme le plomb, le papier, la peinture, le verre et le thé L'objectif des lois Townshend était de gagner 40 000 livres chaque année pour financer l'administration coloniale[6]. Les Townshend Acts soulevèrent la réprobation des colons américains, comme l'indiquent les Lettres d'un fermier de Pennsylvanie aux habitants des colonies britanniques de l'avocat John Dickinson (1732–1808). Au cours de l'été 1768, les agents des douanes confisquèrent un sloop appartenant à John Hancock, accusé de violer les règlements commerciaux. La foule prit d'assaut les douanes, obligeant les agents à se réfugier sur un navire de guerre anglais mouillant dans le port. Les troupes anglaises reçurent des renforts pour maintenir le calme à Boston. Londres dut faire marche arrière devant le boycott des marchandises et les lois furent abrogées, même si la taxe sur le thé fut maintenue.

Paul Walker (1735–1818), une représentation du Massacre de Boston

Le 5 mars 1770, au cours d'une violente manifestation dans le centre de Boston, les soldats anglais tirent sur la foule. Sept personnes trouvent la mort dans le « massacre[7] ». Le lendemain, les autorités royales décident de transférer les troupes du centre ville vers le fort de Castle Island, située dans le port de Boston, afin de calmer la tension. Les responsables du massacre, le capitaine Thomas Preston et ses soldats, sont jugés et finalement acquittés. Les journaux de la ville mettent en valeur cet évènement et en font le symbole de la tyrannie anglaise. En 1772, des rebelles attaquent le navire anglais Gaspée dans la colonie de Rhode Island.

Le Tea Act est voté en mai 1773 afin de permettre à la Compagnie anglaise des Indes orientales de vendre son thé aux colonies de l'Amérique du Nord sans acquitter de taxes. Elle avait pour but de rétablir les finances de la compagnie en renforçant son monopole. Les colons réagirent à nouveau par le boycott.

Une représentation de la Boston Tea Party (1773)

Le 16 décembre 1773, des colons déguisés en Indiens jettent plus de 300 caisses de thé dans le port de Boston : c’est la Boston Tea Party. En représailles, l'Angleterre décide :

  1. de fermer le port de Boston en mars 1774,
  2. d'étendre le Quartering Act en permettant la réquisition des logements par les soldats anglais
  3. d'imposer une lourde indemnité aux Bostoniens
  4. de réformer la procédure judiciaire

Ces quatre mesures sont appelées Intolerable Acts par les Américains et Coercive Acts ou Punitive Acts par les Anglais. En septembre 1774 se réunit le premier Congrès continental à Philadelphie, ce qui marque le début de la Révolution américaine.

Les formes et les acteurs de la résistance américaine[modifier | modifier le wikicode]

Tout au long des années 1760-1770, les colons américains organisent la résistance et la protestation à la politique britannique. Des réseaux de solidarité se mettent en place, malgré la diversité et l'étendue des colonies. Les principaux foyers de rébellion sont Boston, New York, Philadelphie et la Virginie. Les Fils de la Liberté, une organisation secrète d'opposants américains à la politique anglaise, furent particulièrement actifs. Leurs actions allaient de la rédaction de pamphlets, à la plantation d'arbres de la liberté, de réunions à la violence urbaine. Les comités de correspondance permettaient d'établir un réseau entre les associations des différentes villes américaines. Le profil sociologique des Fils de la Liberté n'était pas uniforme : on trouvait aussi bien des avocats que des ouvriers. Les représentants les plus importants de ce mouvement étaient Paul Revere, Thomas Young, Joseph Warren, Patrick Henry, John Hancock], James Otis, Thomas Crafts Jr., John Adams et son cousin, Samuel Adams, qui fut le meneur de la rébellion en Nouvelle-Angleterre.

Progressivement, les acteurs de la contestation politique cherchent à se fédérer et à coordonner leurs actions. Ainsi, le 20 octobre 1774, la Continental Association cherche à renforcer la campagne des boycotts des produits anglais. L'ultime étape, qui fait définitivement passer la contestation en Révolution, est celle du Congrès continental, acte éminemment illégal du point de vue de la métropole, car il crée une assemblée politique indépendante.

Les actions menées contre le pouvoir britannique prennent des formes de plus en plus radicales et organisées. Le recours au boycott dès 1764 à Boston, est l'une des solutions les plus efficaces. Les manifestations se succèdent pour réclamer l'abrogation des actes. Les violences, au départ sporadiques et limitées, se multiplient contre les représentants de l'autorité anglaise. Les émeutes urbaines s'en prennent le plus souvent aux gouverneurs, mais aussi aux agents de douanes et des impôts. La rupture entre les colonies et la métropole aboutit à la guerre d'indépendance et à la fondation d'une République.

Notes[modifier | modifier le wikicode]

  1. (en) Thomas Kindig, « Proclamation of 1763 », Independence Hall Association, 1999-2007, consulté le 26-06-2007
  2. (en) Thomas Kindig, « The Sugar Act. Titled The American Revenue Act of 1764 », Independence Hall Association, 1999-2007, consulté le 26-06-2007
  3. Jacques Binoche, Histoire des États-Unis, Paris, Ellipses, 2003, p. 42
  4. (en) Thomas Kindig, « The Currency Act », Independence Hall Association, 1999-2007, consulté le 26-06-2007
  5. (en) « A Summary of the 1765 Stamp Act », The Colonial Williamsburg Fundation, 2007, consulté le 26-06-2007
  6. (en) Thomas Kindig, « The Townshend Revenue Act », Independence Hall Association, 1999-2007, consulté le 27-06-2007
  7. Élise Marienstras, Naomi Wulf, Révoltes et révolutions en Amérique, Atlande, 2005, (ISBN 2-35030-015-3), page 60

Bibliographie pour ce chapitre[modifier | modifier le wikicode]

  • Élise Marienstras, Naomi Wulf, Révoltes et révolutions en Amérique, Paris, Atlande, 2005