En raison de limitations techniques, la typographie souhaitable du titre, « La belle au bois dormant : La treizième fée La belle au bois dormant/La treizième fée », n'a pu être restituée correctement ci-dessus.
ENFIN arriva le moment le plus émouvant de la fête : les fées allaient faire leurs dons à l'enfant royale.
Pendant le festin la petite Princesse Primerose était restée dans son berceau, gardée par une vieille servante, qui avait déjà élevé sa mère. Le Roi donna l'ordre d'apporter le bébé dans la grande salle du banquet. Les convives étaient silencieux et les musiciens avaient abandonné leurs instruments.
La Reine ouvrit ses bras pour recevoir la petite Princesse endormie et la pressait tendrement contre son cœur comme si elle eût voulu la préserver de tout mal ; ce geste maternel si tendre aurait touché le cœur le plus dur. Une seule personne de toute l'assistance y resta insensible, ce fut la vieille fée jalouse et rancunière qui, regardant la Reine en grimaçant un vilain sourire, lui dit :
– " Reine, votre figure est pâle et vos lèvres tremblent. Que craignez-vous donc dans ce jour de fête ? "
Mais la Reine frissonna et ne répondit pas.
Alors une fée se leva et dit :
– " Je veux commencer. Le don que je fais à la Princesse Primerose sera la Beauté. Ses yeux seront comme des étoiles et ses cheveux brilleront comme les rayons du soleil du printemps qui l'a vu naître, ses joues seront aussi fraîches et roses que les pétales des fleurs dont elle porte le nom. Sa beauté sera incomparable. "
Puis une seconde fée s'avança et dit :
– " Après la beauté, elle possédera la Sagesse. La Princesse sera plus sage que jamais mortel ne l'a été. "
– " Je lui donne la Vertu " déclara la troisième fée.
Et la Reine hocha la tête en souriant, car bien qu'elle appréciât la beauté et la sagesse, elle savait que rien ne vaut la bonté du cœur.
Et les fées continuèrent à offrir leurs dons à Primerose.
La quatrième dit qu'elle aurait une grâce admirable dans tout ce qu'elle ferait, la cinquième qu'elle chanterait comme un rossignol ; la sixième qu'elle danserait avec une grâce parfaite, et le défilé continua jusqu'à ce que le Roi fut certain que sa fille aurait tout ce qu'il avait pu désirer. Jusqu'alors, la vieille fée n'avait pas dit un mot.
Enfin elle s'avança et, jetant un coup d’œil méchant sur toute l'assistance, elle parla ainsi :
– " Avez-vous tous fini ? Alors, écoutez ma prédiction.
Le jour où Primerose aura atteint sa quinzième année elle se percera la main avec un fuseau et elle mourra."
Chacun frémit en entendant ces terribles paroles. La Reine poussa un cri tandis qu'elle pressait son enfant contre son cœur :
– " Non ! Non ! Ayez pitié ! Jetez un mauvais sort sur moi, mais n'étendez pas votre haine jusqu'à cette enfant."
À ce déchirant appel, tous les assistants se mirent à pleurer tandis que la vieille fée marmottait des mots incompréhensibles entre ses dents. Alors, le Roi se dressant soudainement, saisit la poignée de son épée, mais, avant qu'il ait eu le temps de la tirer hors du fourreau, une autre voix arrêta son geste.
– " Laissez votre épée, O Roi ! Ne commettez pas un acte irréparable. Nul mortel ne peut frapper une fée sans en être puni. Rassurez-vous pour votre fille, elle ne mourra pas. "
Alors apparut la douzième fée qui s'était dissimulée derrière la tapisserie et elle prononça ces paroles :
– " Je viens la dernière et, autant que je le puis, je réparerai le mal que ma sœur a fait. La Princesse il est vrai se percera le doigt avec un fuseau lorsqu'elle atteindra l'âge de quinze ans ; mais au lieu de mourir, elle tombera dans un profond sommeil, ce sommeil durera cent ans, au bout desquels le fils d'un roi viendra la réveiller. "
L'épisode attendu du don des fées ne se passe qu'au quatrième chapitre pour que le lecteur ait le temps de s'attacher à une histoire différemment contée.
La sorcière s'adresse directement à la Reine qui n'a pas oublié la menace du chapitre précédent.
Les trois premiers dons sont la Beauté, la Sagesse et la Vertu, que la Reine préfère car elle pense que les qualités du cœur sont vitales.
La prédiction de la sorcière est bien connue des lecteurs, mais pas de l'assistance qui est horrifiée.
L'illustrateur représente cet effet dramatique par le doigt tendu de la sorcière pointant sur le bébé.
La fée la plus jeune est aussi la plus intelligente de l’assemblée : elle a anticipé qu'elle aurait besoin d'intervenir après sa consœur.
Elle serre le bébé sur son cœur et lance un appel à la pitié.