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En raison de limitations techniques, la typographie souhaitable du titre, «
Géométrie symplectique : Géométrie symplectique linéaire
Géométrie symplectique/Géométrie symplectique linéaire », n'a pu être restituée correctement ci-dessus.
L'étude des formes bilinéaires symétriques donne lieu à la géométrie euclidienne, la géométrie riemannienne et la géométrie pseudo-riemannienne. Au contraire, l'étude des formes bilinéaires alternées donne lieu à la géométrie symplectique. Ce cours a pour objectif d'introduire les principales définitions et les propriétés élémentaires des formes symplectiques, en commençant par une première étude en algèbre linéaire.
Rappels d'algèbre linéaire réelle
Sur un espace vectoriel
V, une forme bilinéaire

est dite :
- symétrique lorsque pour tous vecteurs v et w de V, on a :
;
- antisymétrique lorsque pour tous vecteurs v et w de V, on a :
.
Toute forme bilinéaire a sur V s'écrit uniquement comme somme d'une forme bilinéaire symétrique et d'une forme bilinéaire antisymétrique :
où
et
.
Une forme bilinéaire a sur V induit une application linéaire
définie comme suit :
.
Le
noyau de la forme
a désigne le noyau de cette application linéaire.
Définition
Sur un espace vectoriel réel
V, une
forme symplectique est une forme bilinéaire

, supposée :
- antisymétrique : pour tous vecteurs v et w de V,
;
- non dégénérée : pour tout vecteur v, il existe au moins un vecteur w tel que
.
La non-dégénérescence signifie exactement que le noyau de ω est nul, ou encore, que ω réalise un isomorphisme linéaire
.
- Remarque : L'existence d'une forme symplectique implique que la dimension de V soit paire. Ce fait sera établi par la classification des formes symplectiques donnée ci-dessous.
Définition
Si

et

sont deux espaces vectoriels symplectiques, une application linéaire

est dite
symplectique lorsque, pour tous
v et
w dans
V₁, on a :
.
Certains auteurs parlent de
transformation canonique. Si
v est un vecteur du noyau de
T,
v appartient
a fortiori au noyau de

. Comme

est non dégénérée,
v est nul. Il s'en suit que toute transformation canonique est nécessairement injective.
En particulier, les transformations canoniques d'un espace symplectique
dans lui-même forment un sous-groupe du groupe
des isomorphismes linéaires de V, noté
. On reviendra sur l'étude de ce groupe.
L'exemple suivant est fondamental :
Début de l'exemple
Exemple 1
Les coordonnées d'un vecteur de l'espace

sont notées

. L'espace
V est muni de la forme symplectique :
.
La forme
est représentée par la matrice antisymétrique :
;
où
In désigne la matrice identité de taille
n.
Fin de l'exemple
C'est essentiellement le seul espace symplectique de dimension 2n, du moins à isomorphisme linéaire près. Ce point est démontré dans la section suivante. Cependant, l'isomorphisme n’est pas unique. En pratique, la manière dont se présente un espace symplectique joue un rôle important. D'autres exemples d'espaces symplectiques souvent utilisés seront donnés après la classification.
Rappelons le résultat suivant :
Début d’un théorème
Théorème
Soit

une forme antisymétrique sur un espace vectoriel réel
E de dimension finie. On note
r la dimension du noyau. Il existe une base

avec

telle que :
forme une base du noyau de a ;
,
et
.
Fin du théorème
Début d'une démonstration
Démonstration
Procédons par récurrence sur la dimension de
E.
- Initialisation : en dimension 0, la seule forme bilinéaire sur l'espace nul est l’application nulle, la seule base est la famille vide et le résultat s'applique (avec r = 0 et k = 0).
- Supposons le résultat démontré jusqu'à la dimension n-1.
- Si a est la forme nulle, alors le noyau de a est E ; et toute base de E convient. Sinon, fixons un vecteur X₁ de E qui ne soit pas dans le noyau de a. Choisissons un vecteur Y₁ tel que a(X₁,Y₁) soit non nul. Quitte à modifier Y₁ en Y₁/a(X₁,Y₁), on est en droit de supposer a(X₁,Y₁)=1. Les vecteurs X₁ et Y₁ sont non colinéaires et engendrent donc un plan vectoriel P.
- L'ensemble des vecteurs v vérifiant
est un sous-espace vectoriel Q de E. Tout vecteur w peut s'écrire :
où
et
.
- En particulier, P et Q sont supplémentaires. Le noyau de a est évidemment contenu dans Q. Appliquons l'hypothèse de récurrence à la restriction b de a à Q. Il existe une base
du noyau de b, étendue en une base
vérifiant les identités
,
et
.
- La famille
vérifie les propriétés requises. (Le noyau de a est égal au noyau de b.)
Par récurrence forte, on démontre le résultat annoncé.
Fin de la démonstration
Appliquons ce résultat d'algèbre linéaire réelle au cas d'une forme symplectique ω. Comme ω est non dégénérée, le noyau est nul (donc r = 0). Le théorème précédent donne l’existence d'une base
avec 2k la dimension de V. On en déduit que :
- La dimension d'un espace symplectique est paire.
De plus, l'application
qui à v associe ses coordonnées dans la base
est visiblement symplectique pour la forme symplectique usuelle
sur
. D'où :
- En dimension 2n, il n'existe à isomorphisme près qu'un unique espace vectoriel symplectique.
Début de l'exemple
Exemple 2
En géométrie symplectique, étant donné un espace vectoriel réel (de dimension finie)
E, il est courant de noter les coordonnées d'un point de l'espace

sous la forme

. Les dernières coordonnées
p sont pensées comme l'impulsion, les premières
q comme la position. L'espace

est alors muni de la forme symplectique suivante :
.
Si
est un isomorphisme linéaire, alors sa transposée
est elle-même inversible. De fait,
est un isomorphisme linéaire
. Cet isomorphisme est symplectique pour les formes
et
.
Justification : Cette forme est clairement bilinéaire et antisymétrique. Pour la non-dégénérescence, prenons un vecteur non nul
. Deux possibilités apparaissent :
- Soit l'impulsion p₁ est non nul : on prend p₂=0 et
un vecteur de E qui n’est pas dans le noyau de p₁. Dans ce cas,
.
- Soit l'impulsion p₁ est nulle, auquel cas q₁ est nécessairement non nul. Comme
sépare les points de E, il existe une forme linéaire
sur E vérifiant
. En prenant
, on trouve
.
Fin de l'exemple
Début de l'exemple
Exemple 3
Si (
E,
g) est un espace vectoriel euclidien, le dual
E* s'identifie à
E via l'isomorphisme linéaire

induit par la forme bilinéaire
g. La forme symplectique

définie sur

induit alors une forme symplectique sur

:
.
Toute isométrie
induit une transformation canonique :
.
Remarque : L'exemple 1 est un cas particulier de l'exemple 3.
Fin de l'exemple
Début de l'exemple
Exemple 4
Si (
H,
h) est un espace vectoriel hermitien,
H est naturellement muni d'une forme symplectique :

(où

désigne la partie imaginaire).
- Toute isométrie
est symplectique pour les formes
et
.
Justification : Deux points nécessitent vérification :
- Antisymétrie : Si v et w sont dans H, alors par sesquilinéarité,
. En particulier, en prenant la partie imaginaire,
.
- Non-dégénérescence : Pour un vecteur non nul v de H, on a :
.
Remarque : La métrique hermitienne
h est ici par convention linéaire à droite et antilinéaire à gauche.
Fin de l'exemple
En fait, tout espace vectoriel symplectique peut être obtenu comme dans l'exemple 4. Plus exactement, toute forme symplectique sur un espace vectoriel réel peut être vue comme la partie imaginaire d'une forme hermitienne sur V muni d'une structure complexe.
Définition
Une
structure complexe (ou structure complexe linéaire) sur un espace vectoriel réel
V est la réalisation de
V comme espace vectoriel complexe. Elle est déterminée par la seule action de
i, donnée par un endomorphisme réel
J de
V vérifiant :
Remarque : La structure complexe
J est inversible et

est une racine carrée de
J.
Alors :
Début d’un théorème
Théorème
Si
v est muni d'une forme symplectique ω, une structure complexe
J est dite ω-compatible lorsque :
- J est un isomorphisme symplectique, ce qui équivaut à ce que
définisse une forme bilinéaire symétrique ;
est définie positive.
En particulier,

est un produit euclidien sur
V ; et

est un produit hermitien sur l'espace vectoriel complexe

.
Fin du théorème
Début d'une démonstration
Démonstration
*
est une forme bilinéaire symétrique :
En effet, pour tous vecteurs v et w de E, comme J est un symplectique, il vient :
;
est un produit hermitien :
Le calcul est similaire :

. On montre ainsi que

est sesquilinéaire. Par ailleurs,

est visiblement défini positif : pour tout vecteur non nul
v, on a :

.
Fin de la démonstration
Début d’un théorème
Théorème
Pour tout espace vectoriel symplectique

il existe une structure presque complexe ω-compatible.
De plus, l'ensemble
I(
V) des structures complexes ω-compatibles forme une partie connexe de GL(V). Les groupes

et

agissent transitivement sur
I(
V) par conjugaison.
Fin du théorème
Début d'une démonstration
Démonstration
*
Existence :
- Soit g un produit euclidien sur V. Il existe un unique endomorphisme g-antisymétrique A tel que, pour tous vecteurs v et w :
. La décomposition polaire donne : A=O.J où O est un endomorphisme orthogonal. Alors J est une structure complexe ω compatible.
- Par construction, les endomorphismes J ainsi obtenus sont exactement toutes les structures complexes ω-compatibles, et dépendent continûment du produit euclidien g. De fait, l'espace I(V) est l'image continue de l'espace des produits euclidiens sur V. De fait, il est connexe.
- À compléter...
Fin de la démonstration
Note : Dans le livre de Michèle Audin, il est rapporté un résultat de Sévennec établissant un difféomorphisme de I(V) sur un ouvert de l'espace des matrices symétriques.
Début de l'exemple
Exemple 4 bis
La multiplication par
i sur un espace hermitien

est une isométrie
J, et donc en particulier, une structure complexe et un isomorphisme symplectique de

. On constate que la forme bilinéaire symétrique définie alors par

et

est

(partie réelle de
h). En particulier, elle est non dégénérée, et donc
J est

-compatible. La forme hermitienne
h n'est autre que la forme hermitienne associée à

.
Fin de l'exemple
Début de l'exemple
Exemple 3 bis
L'espace vectoriel

est muni d'une structure presque complexe naturelle

. Si
E est munie d'un produit euclidien
g, alors
J est

compatible, et le produit euclidien associé est précisément

.
Fin de l'exemple
Définition
L’
orthogonal d'un sous-espace
W d'un espace vectoriel symplectique

est défini par :

.
L'orthogonal n’est pas nécessairement un sous-espace supplémentaire. Par exemple, l'orthogonal d'une droite vectorielle la contient.
On a ainsi plusieurs cas particuliers :
Définitions
Un sous-espace vectoriel
W d'un espace symplectique

est dit :
- isotropique lorsque W est contenu dans son orthogonal ;
- lagrangien lorsque W est égal à son orthogonal ;
- coisotropique lorsque W contient son orthogonal.
En particulier,
W est
lagrangien si et seulement s'il est
isotropique et coisotropique.
L'orthogonal d'un hyperplan H est une droite D. L'orthogonal de D, à savoir H, doit contenir D. Autrement dit, l'orthogonal de H est contenu dans H : tout hyperplan est nécessairement coisotropique.
Début de l'exemple
Exemple 5
Si

est un espace vectoriel symplectique, l'espace

est muni de la forme symplectique

. Le graphe d'une application linéaire

est un sous-espace lagrangien ssi
T est symplectique.
Fin de l'exemple
Si W est un sous-espace coisotropique de V, alors ω induit une forme symplectique sur l'espace quotient
.