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Psychologie des violences conjugales/Comprendre

Leçons de niveau 17
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Chapitre no 2
Leçon : Psychologie des violences conjugales
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La violence conjugale se décline sous diverses formes telles que ; la violence physique, sexuelle, psychologique et économique. Chacune de ces manifestations peut être dévastatrice. Souvent, ces différentes formes s’accumulent et interagissent entre-elles, afin de maintenir le contrôle, isoler et opprimer la victime.

Les différents types de violences

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Violence physique

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La violence physique se définit comme l’emploi de gestes violents dans le but de blesser son conjoint [1]. En 2022, les lignes du 3919 (numéro national de référence pour l'écoute et l'orientation des femmes victimes de violences), 59% des victimes dénoncent des violences physiques (dont coups portés à main nue, coups de pied, 75%) [2]. Parmi ces gestes violents on peut noter le fait d'être giflé, le fait de recevoir des coups (poings, ceinture…), le fait d'être poussé ou encore le fait de se faire tirer les cheveux.

Violence psychologique

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Les violences psychologiques sont caractérisées par un comportement ou un ensemble d'actes qui visent à rabaisser ou à dénigrer la personne [1]. Sur les lignes du 3919 (numéro national de référence pour l'écoute et l'orientation des femmes victimes de violences), 89% des femmes victimes dénoncent des violences psychologiques, et pour 77% d'entres elles, des violences verbales au cours de l'année 2022 [2]. Sont considérées comme violences psychologiques les propos dénigrants ou dévalorisants tenus en public ou en privé, les insultes, les menaces ou encore la diffusion de vidéos à caractères sexuels.

Violence sexuelle

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Cette catégorie de violence correspond à un et/ou des gestes à caractère sexuel commis, sans consentement, sous la menace ou le chantage [1]. Au 3919 (numéro national de référence pour l'écoute et l'orientation des femmes victimes de violences), en 2022, 14% des femmes dénoncent des violences sexuelles [2].Parmi les violences sexuelles on peut noter le fait de subir des attouchements sexuels sous la contrainte ou encore le fait de subir une relation sexuelle sous la contrainte. Les agressions sexuelles sont définies dans l’article 222-22 du code pénal comme “toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise”, tandis que le viol est définit, lui, dans l’article 222-23, par “tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise”. Cependant, la notion de consentement est ici impliquée par l'élément de violence, contrainte, menace ou surprise mais il nous semble nécessaire de la définir plus explicitement.

Le consentement sexuel peut être défini comme “ l’accord qu’une personne donne à son ou sa partenaire pour participer à une activité sexuelle. Cet accord peut être donné par des paroles, des gestes, ou les deux. Le consentement est impératif. Sinon, on parle de violence sexuelle”. Il doit être donné librement, être éclairé, spécifique, réversible et enthousiaste. C’est à dire que, c’est la personne elle-même, qui doit donner son consentement et ce, sans contraintes extérieures (menaces, manipulation, consommation excessive d’alcool ou de stupéfiants). Mais aussi, que les personnes impliquées dans l’acte doivent être informées au même niveau, des intentions et des pratiques, sans la présence de manipulation et d'omission. Il doit être spécifique afin de consentir ou non, à certains actes, mais aussi et surtout réversible. A tout moment et pour toutes les raisons, une personne peut retirer son consentement, et cette décision doit être respectée. Enfin il doit être enthousiaste afin que la relation soit désirée et non obligée.

Violence économique

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Ce type de violence se définit comme tout comportement visant la privation d'autonomie financière, et/ou le contrôle de la ou du partenaire. Parmi les violences économiques on peut noter le contrôle total des ressources du couple et de leur utilisation, la privation de ressources de l'autre membre du couple ou encore la mise en danger du patrimoine.

Dans une situation de violence conjugale, plusieurs moyens peuvent être utilisés par l’agresseur pour établir une relation de pouvoir et de contrôle des choix du conjoint. Des comportements violents ciblant la vie économique de la victime sont très souvent présents, parce qu'ils sont particulièrement efficaces pour limiter les choix de la victime à long terme. Ces formes de violence, souvent très subtiles au départ, contribuent à l’emprise et font en sorte que le conjoint s’approprie les décisions économiques de la famille, créé une dépendance économique envers lui et affecte la capacité de la victime à subvenir à ses besoins de base et à ceux de ses enfants advenant une séparation.

On retrouve 6 formes de violence économique [3] : contrôle des dépenses et de la gestion financière (surveillance des comptes, critique des achats, prise de décision unilatérale quant aux décisions financières qui concernent la victime ou la famille, etc.) ; vol d'argent (utilisation de carte de crédit sans consentement, emprunt d'argent sous faux prétextes ou sans intention de remboursement, demande d'argent sous contrainte ou menace, etc.) ; usurpation d'identité de la victime (utilisation d'informations personnelle pour créer des dettes à son nom, obtenir des cartes de crédit, etc.) ; limitation de l'accès aux informations financières de la famille (mensonges sur les situations financières, dissimulation de revenus, etc.) ; contrôle de la vie professionnelle de la victime (contrôle des candidatures à un emploi, travail de la victime pour peu de rémunération, diminution des heures de travail dans un but de culpabilisation, etc.) ; utilisation d'argent pour contraindre la victime de rester dans la relation (menace de vengeance financière, menace de ne pas respecter un accord de remboursement, etc.)

Au 3919 (numéro national de référence pour l'écoute et l'orientation des femmes victimes de violences), en 2022[2], 26% des femmes dénoncent des violences économiques. 5% dénoncent des violences administratives.

Cyberviolences

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Ce type de violence est considéré comme l’utilisation malveillante par un conjoint ou ex-conjoint d’outils numériques ou de nouvelles technologies (téléphones, portables, ordinateurs, internet, objets connectés, réseaux sociaux, jeux vidéos, etc.) pour contrôler, surveiller, harceler, intimider, diffamer, exposer, menacer son (ex-)partenaire. Elles s’inscrivent souvent dans un continuum de violences conjugales et interviennent généralement de manière simultanée ou après les premières violences. Comme pour les violences économiques, elles sont présentes sous diverses formes [4]: cyberharcèlement, cybercontrôle, cybersurveillance, cyberviolences sexuelles, cyberviolences économiques ou administratives, cyberviolences via les enfants.

Le cyberharcèlement regroupe tous les agissements malveillants répétés, dans un cadre public ou restreint tels que les intimidations, les insultes, les menaces, les rumeurs ou encore les publication de photos ou vidéos compromettantes. L’utilisation du téléphone est ainsi un outil utilisé afin de nuire et d'envahir de manière très fréquente voir permanente le quotidien de la victime.

Le cybercontrôle regroupe tous les comportements répétés du partenaire ou de l'ex-partenaire visant à connaître et vérifier régulièrement, au moyen d'outils numériques, les déplacements et les relations sociales de sa ou de son partenaire. L'auteur de cybercontrôle peut, par exemple, exiger que sa ou son partenaire soit joignable en permanence, qu'elle ou qu'il lui envoie des photos confirmant exactement où et avec qui elle ou il est, l’empêcher de répondre à des appels,.

La cybersurveillance comprend les actions visant à assurer un contrôle continu des déplacements, des agissements et des relations sociales de sa ou son partenaire par le biais des outils numériques comme des logiciel espion ou des technologies de localisation.

La cyberviolence sexuelle consiste à prendre des vidéos ou des photos pendant un acte sexuel et à menacer leur diffusion ou mettre la menace à exécution pendant la relation ou après la fin de celle-ci dans le but d’humilier la victime.

Les cyberviolences économiques ou administratives consistent à réduire l’autonomie financière et/ou à contraindre les démarches de sa ou de son partenaire. Les auteurs de ces cyberviolences peuvent, par exemple, changer les mots de passe des comptes bancaires pour en interdire l'accès.

Pour finir, les cyberviolences via les enfants consistent en l’utilisation de ces derniers pour exercer un contrôle sur les actions et déplacements de sa ou de son partenaire.

Quelques chiffres ont été recensé en 2022 concernant les types de violences conjugales. 198 000 personnes ont été mises en cause en 2022 pour violences conjugales, dont 69% pour des violences physiques, 4% pour des violences sexuelles et 27% pour d'autres types de violences[5]. Deux tiers des violences conjugales enregistrées en 2022 sont ainsi des violences physiques (66%), près d'un tiers des violences verbales ou psychologiques (30%) et 4% des violences sexuelles.

Malheureusement, les violences ne sont pas toujours faciles à prouver et la victime peut vite se retrouver seule face à une série de questions aussi difficiles à répondre qu’à surmonter. Dans un article publié en novembre 2023[6] sur Le Monde, Audrey Darsonville, professeure de droit pénal, et François Lavallière, magistrat, nous font part de quelques impasses souvent rencontrées et qui amènent à se poser des questions : Comment prouver que l’acte était violent quand la victime n’a pas eu la force de résister ou n’a pas pu s’opposer? Comment attester que l’auteur avait placé la victime dans une situation de contrainte morale annihilant tout consentement ? Comment établir le défaut de consentement quand celui-ci est un fantôme dans la loi ?

Notion de contrôle coercitif

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La notion de contrôle coercitif est importante à connaître et à prendre en compte dans un contexte de violences conjugales. En effet, cette dernière permet de cerner les mécanismes sous-jacents et insidieux de la mise en place et du maintien de comportements violents. Le contrôle coercitif est défini comme une forme continue de violences, comme un acte ou un schéma comportemental de contrôle ou de menace utilisé contre une personne, un ou une partenaire intime ou encore un ou une ex-partenaire dans le but de la rendre dépendante et de la priver de sa liberté d’action. Elle peut se caractériser par des intimidations et des humiliations, de la surveillance, de la manipulation ainsi que de l’isolement. Les méthodes de manipulation employées peuvent être physiques, psychologiques ou encore émotionnelles. L’auteur de contrôle coercitif isole sa victime de toute forme de soutien, réglemente sa vie et la prive d’indépendance ou de moyens pour y accéder.

Le cycle de la violence conjugale

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Le cycle de la violence conjugale est un modèle qui décrit la dynamique récurrente des violences domestiques, montrant comment la violence s'intensifie au fil du temps et enferme la victime dans un cycle destructeur. Ce modèle est souvent divisé en quatre phases distinctes : l'escalade, l'explosion, le transfert, et la “lune de miel” [7].

Phase 1 : L’Escalade

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Durant cette phase, l'agresseur commence à instaurer un climat de tension croissante : c'est la mise en place du système d'emprise. Il utilise des pressions psychologiques pour contrôler et isoler la victime, créant ainsi, un environnement d'anxiété et de peur. La victime, consciente de cette atmosphère hostile, essaie ainsi de maintenir la paix en modifiant son comportement, surveillant ses paroles et ses gestes afin de ne pas "provoquer" son agresseur. Cette période est marquée par une intensification progressive des comportements abusifs, qui peuvent inclure des critiques incessantes, des menaces voilées ou directes, et une surveillance constante.

Phase 2 : L’Explosion

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Cette phase se caractérise par un éclatement de la violence : c'est la mise en place des épisodes de violences. L'agresseur semble perdre le contrôle de lui-même, commettant des actes de violences physiques, sexuelles, ou émotionnelles. En réalité, il utilise cette violence pour asseoir son pouvoir et renforcer son contrôle sur la situation. La victime, souvent sous le choc et désemparée, essaie de désamorcer la situation et de calmer l'agresseur. Cet épisode violent est souvent imprévisible et extrêmement traumatisant pour la victime.

Phase 3 : Le Transfert

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Après l'épisode de violence, l'agresseur va tenter de minimiser l'incident. Il rejette la faute sur la victime, la rendant responsable de la violence qu'elle a subie. Cette inversion des responsabilités plonge la victime dans une profonde confusion et culpabilité, l'incitant à croire qu'elle est la cause de son propre malheur. L'agresseur peut également rationaliser son comportement, le justifiant par le stress ou d'autres facteurs extérieurs.

Phase 4 : La « Lune de Miel »

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Pendant cette phase, l'agresseur cherche à regagner la confiance de la victime. Il promet de changer, s'excuse et peut même montrer des signes de remords. La victime, épuisée et désorientée par les phases précédentes, veut croire en ces promesses de changement. Elle lui donne une nouvelle chance, modifie ses propres comportements dans l'espoir d'améliorer la situation et peut constater certains efforts apparents de l'agresseur pour changer.

Accélération des épisodes de violence

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Malheureusement, le cycle ne cesse de se répéter, et les phases de violence tendent à s'intensifier et à se rapprocher au fil du temps. La victime se retrouve de plus en plus épuisée, psychologiquement et physiquement, perdant peu à peu espoir et confiance en sa capacité à échapper à cette spirale. Il faut généralement un événement déclencheur, pour que la victime réalise l'ampleur du danger auquel elle est exposée, mais aussi pour comprendre que son agresseur cherche à la détruire, mettant potentiellement sa vie (et celle de ses enfants, si le cas est présent) en danger.

La place de l’amour dans les violences conjugales

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Il est souvent difficile pour les victimes de faire la distinction entre les conflits typiques, que peuvent rencontrer tous les couples, et les violences conjugales. Selon les résultats de l’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (ENVEFF, 2000), 29 % des femmes déclarent ne plus aimer leur partenaire violent après des violences répétées. Néanmoins, le sentiment d’amour persiste et paraît indestructible pour beaucoup, puisque 18 % des femmes qui subissent des brutalités physiques déclarent être toujours amoureuses de l’homme qui les maltraite physiquement ou sexuellement. Cette place de l’amour crée donc une certaine ambivalence dans le lien victime-agresseur et constitue souvent le principal obstacle à la rupture dans un contexte de violences conjugales [8].

Les facteurs de risque

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Les facteurs de risque ne sont pas nécessairement des causes directes de violence conjugale. Une combinaison de facteurs individuels, relationnels, communautaires et sociétaux augmente la probabilité de devenir victime ou agresseur dans un contexte de violence conjugale. Certains de ces facteurs sont communs aux victimes et aux agresseurs.

La question du genre

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La société est influencée par un ensemble de normes, de croyances et de pratiques sociales. Notre perception et nos réactions face à la violence conjugale peuvent influencer de manière significative sa prévalence et sa gravité. Dans les couples hétérosexuels, hommes et femmes se comportent souvent en fonction de ce qu’ils et elles pensent que leur identité et celle de l’autre implique, impose. Les rapports de genre jouent un rôle fondamental dans les relations conjugales, bien qu’ils ne soient pas les seuls facteurs explicatifs de ces violences.

Appliquer un tel cadre d’analyse aux violences conjugales implique de reconnaître que nos relations de couple sont influencées par notre socialisation. Cela signifie que nous avons intégré, à des degrés divers, une vision du monde et une façon d’appliquer des normes liées à notre identité sexuelle. En plus des comportements normatifs attendus dans le couple, il est également essentiel de considérer le contexte plus large de domination masculine dans lequel se vivent ces relations.[9]

La place de de la masculinité

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Les normes sociétales qui encouragent les hommes à exercer le contrôle et la domination, ainsi que la perception de la femme comme subordonnée, semblent justifier l'utilisation de la violence, dans l’idée de maintenir une dynamique de pouvoir. Les personnes étiquetées comme « femmes » sont statistiquement plus vulnérables à la violence conjugale.[10] Cette vulnérabilité est amplifiée par le fait que leurs plaintes sont souvent insuffisamment prises en compte, et ce, même dans les pays ayant significativement révisés leur législation. Cependant, il est crucial de noter que les violences conjugales peuvent également affecter les hommes et que la violence peut être perpétrée par des individus de tous genres. Par conséquent, il est essentiel de reconnaître que la lutte contre les violences conjugales nécessite de remettre en question les normes de genre.

Les facteurs socio-économiques peuvent également jouer un rôle dans les violences conjugales. L'instabilité économique et le stress que cela peut engendrer peut venir exacerber les tensions au sein du foyer, augmentant les risques.[11]

La culture joue un rôle important dans les violences conjugales. Effectivement, les normes, croyances et valeurs propres à chaque société, influencent les comportements individuels et les interactions entre les individus. Dans certaines cultures, la violence peut être un moyen de maintenir le contrôle au sein du foyer. De plus, les attentes traditionnelles liées aux rôles de genre peuvent renforcer les déséquilibres de pouvoir entre les partenaires, favorisant ainsi les comportements abusifs.[12]

Facteurs relationnels

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L’isolement social constitue un facteur de risque significatif pour les violences conjugales. Les femmes qui sont socialement isolées, ayant peu de contacts familiaux ou amicaux, présentent un risque accru. En effet, la littérature révèle qu’environ 40% des femmes victimes de violences conjugales sont confrontées à un isolement social.[11]

Facteurs individuels

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Parmi les facteurs individuels, les antécédents de violence familiale ou l’exposition à la violence pendant l’enfance augmentent le risque d’agression ou de victimisation à l’âge adulte. En particulier, avoir été exposé à la violence pendant l’enfance double le risque de développer des comportements violents à l’âge adulte.[13]

Par ailleurs, la consommation excessive d’alcool et de toxiques est aussi identifiée comme un facteur majeur de divers comportements violents, y compris les violences conjugales. En effet, selon un rapport de l'Organisation Mondiale de la Santé, la consommation excessive d’alcool est fortement corrélée à des niveaux élevés d’incidents de violence [14]. Les hommes consommant de l'alcool de manière excessive, seraient plus susceptibles d'être violents envers leurs partenaires. Cela peut s’expliquer par des changements cognitifs induits par l’alcool, affectant notamment la maîtrise de soi et l’attention, ainsi que par l’augmentation des distorsions liées au pouvoir et au contrôle. De plus, pour certains hommes, l’association entre la violence conjugale et l’alcool pourrait refléter une expression de la masculinité [15].

En outre, certains troubles psychologiques tels que les troubles dépressifs, anxieux et de la personnalité, notamment le trouble borderline, peuvent aggraver les tensions et les comportements agressifs au sein des relations intimes, augmentant ainsi le risque de violence [16]. Comprendre ces liens est crucial pour concevoir des interventions efficaces visant à prévenir et à traiter les violences conjugales, en intégrant la santé mentale dans les stratégies de soutien et d’éducation.

Théories explicatives des violences conjugales

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Comprendre les violences conjugales par la théorie de l’attachement

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Comme nous l’avons évoqué précédemment, les violences conjugales représentent un phénomène multidimensionnel aux ramifications complexes, impliquant à la fois des interactions entre les individus et leurs histoires familiales, mais aussi de leurs schémas d'attachement. L’une des théories explicatives des violences conjugales est celle de la théorie de l’attachement.

En nous penchant sur les premières relations familiales et leurs impacts sur le développement des modèles internes de fonctionnement, cette approche nous permet d'analyser les schémas de comportement qui influencent les relations interpersonnelles tout au long de la vie adulte. Parmi les cadres théoriques permettant d'explorer le phénomène des violences conjugales, la théorie de l'attachement, développée par John Bowlby, offre une vision sur la manière dont les expériences précoces avec les figures parentales, nommées également donneurs de soins ou figures d’attachements, influencent les comportements relationnels à l'âge adulte. Mais aussi, comment les modèles d'attachement développés pendant l'enfance peuvent prédisposer les individus à des comportements violents dans leurs relations conjugales ultérieures. A ce sujet, il écrit en 1988 : « L’attachement est actif depuis le berceau jusqu’à la tombe » [17].

Le système d’attachement, selon Bowlby, régule les comportements d'attachement de l'enfant en période de détresse émotionnelle [18]. Les figures d’attachement principales qui procurent le réconfort et la sécurité permettent un développement optimum de régulation émotionnelle chez l'enfant, contribuant ainsi, à la création de modèles internes opérants (MIO) positifs pour soi-même et pour les autres [17][19][20]. Selon Zaouche-Gaudron et Pierrehumbert (2008), Bowlby définit les MIO comme des représentations mentales, conscientes et inconscientes, qui guident les perceptions et les actions de l'individu. Ces derniers se développent à partir des interactions précoces avec les figures d'attachement et influencent les réponses de l'individu dans des situations de stress. Ainsi, les remarques négatives, les critiques, la démonstration de colère et la violence des parents ou donneurs de soins, sont susceptibles d’être perçues par les enfants comme un rejet voire un abandon, et ainsi, favorisent le développement de MIO négatifs et nuisent à l’instauration de modèles relationnels sains [21].

A ce propos, Hotaling et Sugarman ont réalisé une analyse approfondie des risques de violence conjugale, en examinant 52 études comparatives et plus de 97 facteurs potentiels [22][23]. Leur recherche a révélé que le fait d'avoir été victime ou témoin de violence parentale durant l'enfance est le facteur de risque le plus constant pour la violence conjugale. D’autre part, la théorie de l'attachement propose que l'attachement dit insécure se développe en réponse à la violence parentale et peut se caractériser par des comportements violents à l'âge adulte. Mary Main parle de « stratégies insécures » développées par l’enfant qui visent à l’adaptation et à sa survie en cas de figure d’attachement plus détachées des besoins de l’enfant, et qui n’apporte que peu d’attention et d’affection à celui-ci [24]. Bowlby affirme que les expériences d'attachement influencent plusieurs domaines de la vie, dont les relations de couple et la parentalité[17]. Ainsi, les individus ayant un attachement insécure sont majoritairement présents dans les populations cliniques [25].

En 1998, Roberts et Noller ont découvert que la violence physique exercée par les femmes sur leur conjoint, était influencée par l’attachement anxieux des hommes, mais qu’à l’inverse, ses résultats n’étaient pas retrouvés [26]. Ils ont également remarqué que l'anxiété d'abandon chez les deux partenaires était associée à l'usage de violence physique, plus particulièrement si l'un des partenaires n’est pas à l'aise dans l’intimité. Ces observations mettent en avant que l'anxiété d'abandon est un facteur significatif dans la violence exercée par l’un des partenaires dans le couple. Les études longitudinales de Waters et al. et Ehrensaft et al. confirment que l'exposition à la violence domestique dans l'enfance est un prédicteur significatif de la perpétration de violences conjugales à l'âge adulte [27][28]. Il est à noter que la plupart de ses études peuvent présenter des biais de part leurs méthodes qui sont quasi toutes des auto-évaluations rétrospectives d’expériences.

Comprendre les violences conjugales par la théorie de la congruence cible

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L’une des autres théories explicatives des violences conjugales est celle de la congruence cible conceptualisée par Finkelhor et Asdigian (1996)[29] à partir de la théorie des activités de routine et de style de vie. Selon ces derniers, les violences conjugales peuvent s’expliquer par le fait que certaines caractéristiques des victimes de violences conjugales sont plus susceptibles d’y être exposées de par leur « congruence avec les besoins, les motifs ou les réactivités des auteurs » [29][30]. En somme, les auteurs de violences conjugales seraient attirés par certaines caractéristiques des victimes. Selon Sween et Reyns (2017)[30], le risque de victimisation augmente par le biais de trois mécanismes de la congruence cible : la vulnérabilité de la cible (la victime présente des caractéristiques qui lui empêchent de résister à la victimisation, par exemple une petite taille), la grafiabilité de la cible (la victime présente des caractéristiques que les auteurs veulent manipuler, par exemple le sexe féminin), l’antagonisme de la cible (la victime présente des caractéristiques susceptibles d’engendrer des réactions impulsives ou colériques de la part des auteurs).

Très peu d'études ont adopté le prisme de la théorie de la congruence cible pour tenter d’expliquer les mécanismes psychologiques des violences conjugales. La première étude est celle de Sween et Reyns (2017)[30]. Leurs résultats ont démontré que la grande fiabilité de la cible, c’est-à-dire le fait d’avoir des caractéristiques qui attirent les auteurs de violences conjugales, engendre davantage de risques de violences conjugales que la vulnérabilité de la cible ou que l’antagonisme de l’auteur. Zavala (2017) soutient également cette idée puisqu’il a démontré que la grande fiabilité de la cible et la vulnérabilité de la cible sont des facteurs de risques importants de violences conjugales[31]. Enfin, l’étude de Elvey et McNeeley (2019) a démontré que les trois mécanismes de la congruence cible (vulnérabilité, grafiabilité, antagonisme) seraient des facteurs de risques de violences conjugales[32].

Comprendre les violences conjugales par la théorie des troubles de la personnalité

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Certaines recherches se sont essayées à expliquer les violences conjugales par des théories basées sur la psychopathologie et notamment par la théorie des troubles de la personnalité. Certains troubles de la personnalité ont été particulièrement identifiés chez les auteurs de violences conjugales. En effet, les personnalités limites et antisociales seraient des types de personnalité associées à un haut risque de violences conjugales chez les hommes [33][34]. Très peu d’études ont investigué les liens entre troubles de la personnalité et violences conjugales commises par des femmes. Goldenson et al. ont identifié que les femmes auteurs de violences conjugales présenteraient également des personnalités limites et antisociales [35]. Le fait de retrouver ces troubles de la personnalité chez les auteurs de violences conjugales peut s’expliquer par le fait que ces individus ont des difficultés de gestion des émotions et des pensées. Ces troubles de la personnalité sont intimement liés à des styles d’attachement insécures anxieux ou évitant [34].

Comprendre les violences conjugales par les expériences adverses de l’enfance (ACE)

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Enfin, certains chercheurs ont tenté d’expliquer les violences conjugales par les expériences adverses de l’enfance (adverse childhood experiences, ACE). Selon Felitti et al., les ACE regroupent les expériences vécues durant l’enfance (avant 18 ans) et pouvant faire état de maltraitances, de violences, de négligences, de dysfonctionnements familiaux (par exemple, une mauvaise relation parent-enfant, la consommation de substances des parents, l’exposition à des violences [36].

De nombreuses études se sont intéressées aux liens entre ACE et violences conjugales. Il a été démontré que l’exposition indirecte à la violence pendant l’enfance augmente le risque de violences psychologiques, verbales et physique à l’âge adulte [37][38][39]mais que cette exposition à la violence dans l’enfance n’avait d’impact sur les violences conjugales à l’âge adulte que lorsqu’elles se sont produites après les 2 ans de l’enfance[39]. De plus, Sunday et al. ont démontré que les individus adultes ayant été exposé pendant l’adolescence à des violences physiques, sont plus susceptibles de commettre des actes de violences physiques envers leur partenaire intime[40]. Murrell et al. soulignent également le fait que les hommes ayant été exposés à des violences domestiques dans l’enfance, commettent des actes de violences conjugales plus graves, comparativement à des hommes non exposés à ces mêmes actes dans l’enfance[41]. Enfin, dans leur étude longitudinale sur 15 ans, Thulin et al. soutiennent l’hypothèse que les ACE et notamment que l’exposition à la violence à l’adolescence, sont prédictifs de violences conjugales à l’âge adulte 15 ans plus tard[42]. Ces résultats corroborent avec ceux de Capaldi et al. qui avaient identifié le fait d’être victimes de violence ou témoins de conflits intrafamiliaux comme éléments prédicteurs de violences conjugales à l’âge adulte[43]. En somme, l’exposition à la maltraitance (victime ou témoin) dans l’enfance ou l’adolescence ainsi que les ACE augmentent le risque de perpétrer des violences conjugales à l’âge adulte et/ou d’en être victime[44].

Beaucoup d’études se sont donc intéressées aux liens entre ACE et violences conjugales mais sans fournir d’explication à cette relation. Dans leur méta-analyse regroupant 27 études sur les ACE et les violences conjugales, Zhu et al. suggèrent que l’exposition aux ACE est susceptible de déterminer les expériences à l’âge adulte et ainsi le risque de violences conjugales [45]. Plusieurs mécanismes sont abordés pour tenter de comprendre le processus sous-jacent entre ACE et violences conjugales. L’exposition aux ACE pourrait engendrer des difficultés de développement de comportements relationnels sains et que cette association entre ACE et violences conjugales s’inscrit dans une perspective de parcours de vie [45]. La première hypothèse avancée est que les mauvaises relations entre parents et enfants (par exemple, abus répétés par la figure d’attachement envers l’enfant) ont un impact sur le sentiment d’appartenance de l’enfant et son sentiment de sécurité et ainsi sur leur perception du monde et leurs tendances à s’engager dans des relations plus agressives et mal adaptatives [46][45]. Le prisme de la théorie de l’attachement pour expliquer les violences conjugales est expliqué dans la première partie. La deuxième hypothèse avancée par les auteurs pour comprendre les relations entre ACE et violences conjugales est celle des mécanismes neurophysiologiques : les changements physiologiques associés liés au développement de l’individu associés aux ACE conduiraient à davantage de comportements violents [45]. Ceci s’explique par le fait qu’une exposition récurrente au stress peut avoir des retentissements négatifs sur le développement neurologique de l’enfant, ce qui peut conduire à des réactions mal adaptatives au stress et ainsi à des comportements de violences dans les relations intimes [45].

Conséquences des violences conjugales

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Les violences conjugales ont des conséquences dévastatrices, non seulement, sur les victimes directes, mais aussi sur leurs enfants et l'ensemble de l'entourage familial. Ces conséquences variées, allant de l'atteinte physique à la dégradation de l'estime de soi, en passant par des troubles psychologiques profonds, contribuent à la destruction du noyau familial. De plus en plus mises en avant par la recherche, elles nous permettent aujourd'hui de mieux comprendre leur ampleur et leur gravité.

Chacune des différentes catégories de violences (physique, émotionnelle, sexuelle, économique) entraîne des répercussions spécifiques sur les victimes. Par exemple, la violence physique peut provoquer des blessures corporelles et des traumatismes durables, de son côté, la violence émotionnelle impacte négativement et drastiquement l'estime de soi. Tous ces aspects peuvent conduire à des troubles anxieux et de la dépression [47].

Les enfants exposés à ces violences, subissent également des dommages considérables. Berger souligne que les enfants témoins de violence, peuvent ressentir celle-ci comme si elle leur était personnellement infligée[48]. Les conséquences pour eux sont multiples et peuvent être physiques, psychologiques ou développementales [49]. Ils peuvent, par exemple, souffrir de lésions traumatiques lorsqu'ils tentent de s'interposer ou de développer des troubles somatiques et psychologiques à long terme. La recherche montre que ces enfants sont à risque de développer des comportements agressifs, des troubles de l'attention et des difficultés scolaires [50].

Le soutien de l'entourage familial est souvent insuffisant, ce qui exacerbe les effets des violences. L'incompréhension familiale et les stigmates associés peuvent isoler davantage la victime, aggravant ainsi sa détresse psychologique et son sentiment de honte et de culpabilité. Les proches, souvent impuissants ou ignorants des réalités de la violence conjugale, peuvent renforcer le sentiment d'abandon et d'isolement de la victime [51].

En résumé, les violences conjugales ont des conséquences graves et multiformes qui affectent non seulement les victimes directes, mais aussi leurs enfants et leur famille élargie. Une compréhension approfondie de ces dynamiques est essentielle pour fournir un soutien adéquat et aider à la reconstruction de l'estime de soi et du bien-être psychologique des victimes et de leurs enfants.

Notes et Références

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  1. 1,0 1,1 et 1,2 Violences conjugales. Service-Public.fr. https://www.service- public.fr/particuliers/vosdroits/F12544
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