Guerres au XXe siècle/Exercices/Le front (novembre 1914-mars 1918), un enfer pour le soldat ?
« Durant quelques jours, le froid a été très vif, le thermomètre était descendu à moins 14 degrés. Il ne fait pas très chaud pour coucher dans les tranchées qu'en beaucoup d'endroits 50 mètres à peine séparent de celles de Boches. Le bruit des moulins à café ou mitrailleuses ne s'arrête jamais ; la nuit, des fusées éclairantes, des grenades à main qu’ils lancent, la garde […] rendent le sommeil impossible […] il pleut souvent; tout ce qui tombe s’amasse en nappes boueuses […] nous sommes obligés de nous coucher là-dedans […], nous avons les pieds dans l’eau.
Quoique cela, il n’y a parmi nous aucune trace de découragement, une volonté inflexible tendue vers le but final. C’est-à-dire la victoire. […] J’ai le ferme espoir que cela finira bientôt et que nous chasserons ces Huns de la France que vous m’avez appris à connaître et à aimer. »
— Le 4 février 1915, à Monsieur et Madame T., instituteurs.
« Ma chère mère,
Par quel miracle suis-je sorti de cet enfer, je me demande encore bien des fois s'il est vrai que je suis encore vivant ; pense donc, nous sommes montés mille deux cents et nous sommes redescendus trois cents ; pourquoi suis-je de ces trois cents qui ont eu la chance de s'en tirer, je n'en sais rien, pourtant j’aurais dû être tué cent fois […]. Nous étions tous montés là-haut après avoir fait le sacrifice de notre vie, car nous ne pensions pas qu'il fût possible de se tirer d'une pareille fournaise. […} À la souffrance morale de croire à chaque instant la mort nous surprendre viennent s’ajouter les souffrances physiques de longues nuits sans dormir : huit jours sans boire et presque sans manger, huit jours à vivre au milieu d'un charnier humain, couchant au milieu des cadavres, marchant sur nos camarades tombés la veille. […] Nous avons tous biens vieilli, ma chère mère, et pour beaucoup, les cheveux grisonnants seront la marque éternelle des souffrances endurées ; et je suis de ceux-là. Plus de rires, plus de gaieté au bataillon, nous portons dans notre cœur le deuil de tous nos camarades tombés à Verdun du 5 au 12 mars. […] Tu as raison de prier pour moi, nous avons tous besoin que quelqu'un prie pour nous, et moi-même bien souvent quand les obus tombaient autour de moi, je murmurais les prières que j'ai apparises quand j'étais tout petit, et tu peux croire que jamais prière ne furent dites avec de ferveur. »
— Gaston Brion (soldat français), samedi 25 mars 1916
« On ne saurait expliquer la résistance acharnée des combattants sans évoquer un certain « consentement » au conflit […]. Ce terme de ne signifie pas que les soldats aient défendu joyeusement leur territoire, qu’ils aient combattu la « fleur au fusil » ou avec enthousiasme. Il permet simplement de rappeler qu’ils sont les bras armés d’une culture de guerre extraordinairement agressive, à laquelle nombre d’entre eux finissent par adhérer, non seulement en France mais aussi chez les autres belligérants. Un mélange de volonté de vengeance des camarades morts au combat, de haine de l’ennemi et d’investissement personnel dans la défense du sol national, de sa famille, de son foyer. »
— Bruno Cabanes, L'Histoire, juillet-août 2002
« Le choix du terme même de « consentement » pose problème. En effet, « consentement » sous-entend une liberté de choix. Or peut-on affirmer que les combattants de 14-18 avaient le choix de refuser la guerre ? Les termes d'obéissance, de soumission ou de résignation ne seraient-ils pas plus appropriés ? Ce n'est donc pas la question du consentement de millions d'Européens qu'il faut poser, c'est celle de leur obéissance.
Sans exclure le sentiment nationalk, une multitude d'autres facteurs peuvent expliquer la longue ténacité de poilus de 14-18. Parmi ceux-ci, l'importance du lien maintenu avec l'arrière, le poids du sens du devoir, celui de la culture de l'obéissance. En outre, les Etats se sont tous dotés d'un arsenal répressif violent et efficace. Car si les hommes ont tenu, c'est avant tout parce que, le plus souvent, ils n'eurent pas le choix. »
— Rémy Cazals, Frédéric Rousseau, Le Cri d'une génération, 2001
« Les camarades tombent tout autour de moi, je ne voix plus rien, mais, chose curieuse, je n’avais pas peur. Je comprenais que si nous lâchions pied, nous étions aussi sûrement perdus, et pour tirer plus juste nous montons sur le talus de la tranchée. Là nous les tuons au fur et à mesure qu'ils avancent dans le boyau où ils ne peuvent passer qu'un à un. Mais leurs bombes tombent toujours, et c'est terrible de voir les camarades hachés, je suis tout couvert de sang. »
— Julet Gillet (fils d'un agriculteur des Vosages ; il a survécu à la guerre)
- Quel est le moral du soldat (doc. no 1) ? Comment l’expliquer ?
- Quels faits montrent la violence des combats (doc. no 2) ?
- Sur quels points les historiens cités (doc. no 3) s'opposent-ils ? Quels éléments communs apparaissent dans leur argumentation ?
Cette solution n'a pas été rédigée. Vous pouvez le faire en modifiant le paramètre « contenu
» du modèle. Comment faire ?