Utilisateur:Urbain Kokolo Landu

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I. THEORIE DE L’ABUS DE DROIT

1. Enoncé de la théorie

L’abus de droit est une "théorie qui correspond à l’exercice d’un droit par son titulaire dans des conditions telles que cet exercice constitue une faute et peut être sanctionné." D’origine jurisprudentielle, cette théorie a un contenu que nous mettrons en rapport avec le droit de propriété avant d’en présenter les critères retenus par la jurisprudence pour son application.

2. Origine de la théorie de l’abus de droit

	La théorie de l’abus de droit a été pour la première fois évoqué dans un arrêt de la chambre des requêtes de la Cour de cassation française du 3 août 1915 surnommé l’arrêt "Clément Bayard", arrêt qui traite du conflit de deux propriétaires mitoyens : l’un utilisant son fonds comme terrain d’envol des dirigeables et le second, non content des activités du premier et ne supportant pas le survol de son terrain par ces objets volants, pose sur sa propriété de carcasses de bois et de ferrailles pointues qui perceront l’un des ballons du premier. Ce dernier assignera son voisin en justice en réparation du dommage subi.

Évidemment, pour se défendre, le défendeur usera de l’article 544 du code civil français qui stipule que la propriété est un droit absolu, et prétendra qu’il était libre d’user de sa terre comme il voulait. Mais les juges le condamneront à la réparation des dommages qu’il a causés aux activités de son voisin au motif que le dispositif qu’il avait mis en place n’avait aucune utilité et qu’il l’a mis en place dans la seule intention de nuire aux activités de son voisin.

Signalons que, bien qu’elle soit d’origine jurisprudentielle, la théorie de l’abus de droit provient de l’interprétation large de l’article 544 du Code civil français qui, tout en faisant de la propriété un droit exclusif et absolu, admet aussi des restrictions à celle-ci ; restrictions résultant de la loi et des droits réels appartenant à autrui.


II. THEORIE DE L’ABUS DE DROIT ET DROIT DE PROPRIETE

1. Théorie de l’abus de droit : limite de l’exercice du droit de propriété ?

L’article 2 de la Déclaration de droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 fait de la propriété un de droits naturels et imprescriptibles de l’homme au même titre que la liberté, la sûreté et la résistance à l’oppression.

L’article 17 de la même Déclaration renchérit en qualifiant la propriété "droit sacré et inviolable " auquel on ne doit "porter atteinte que par nécessité publique et moyennant une indemnité juste et préalable".

À ce niveau, on peut voir déjà que la propriété subit une restriction par rapport à la nécessité publique. C’est-à-dire, lorsque la nécessité publique ou l’intérêt général l’exige, on peut porter atteinte au droit de propriété.

Plus tard, en 1804, le Code de Napoléon fut promulgué. En son article 544, il stipule que la propriété est le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive, sauf les restrictions résultant de la loi et des droits réels appartenant à autrui.

Cet article donne lieu, en fait, à ce que d’aucuns considèrent comme une contradiction. D’un coté, il confère au titulaire du droit de propriété la liberté d’user de son droit d’une manière absolue et exclusive, de l’autre, il restreint ce droit par rapport à la loi et aux droits de tiers. En RDC, tout en affirmant que l’expression abus de droit est criticable, le législateur colonial a admis que l’idée contenue dans la théorie de l’abus de droit est parfaitement juridique, car un acte licite en lui-même, dans ses conditions extérieures et matérielles, devient illicite par le caractère antisocial de son but purement méchant de nuire à autrui.

Le contenu de ce même article sera retenu par le législateur congolais. En effet, la loi no 73-021 du 20 juillet 1973, en son article 14, définit en ces termes :" la propriété est le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive, sauf les restrictions qui résultent de la loi et des droits réels appartenant à autrui…"

Ainsi, peut-on dire qu’au-delà de la jurisprudence, on peut dire que la loi elle-même a prévu l’abus de droit sans le qualifier comme tel en prévoyant des restrictions légales et des restrictions par rapport aux droits appartenant à autrui et à l’intérêt général.

2. Critères retenus par la jurisprudence pour l’existence de l’abus de droit dans le droit privé

L’arrêt fondateur de la théorie de l’abus de droit pose deux conditions pour qu’on parle de l’abus de droit : "[…] il ne peut y avoir abus de droit que si le propriétaire exécute chez lui, sans aucun profit pour lui-même, un acte qui apporte un trouble au propriétaire du fonds voisin restant dans la limite de sa propriété [...]."

En fait, l’abus de droit suppose que l’action abusive remplit les deux critères suivants :

• Elle doit être dépourvue d’utilité ; • Et doit relever d’une intention de nuire.

Il sied de noter que c’est le juge lui-même qui apprécie souverainement l’existence ou la réunion de ces deux critères. BIBLIOGRAPHIE

1. TEXTES LEGAUX Loi no 73/021 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés (J.O.Z., no 3, 1 février 1974, p.69) Code civil français

2. OUVRAGE LUKOMBE NGHENDA, Droit civil des biens, P.U.C, Kinshasa, 2003

3. JURISPRUDENCE Cass. req. 3 août 1915, pourvoi no00 – 02378, Clément – Bayard.

4. INTERNET www.lawoperationnel.com/EncyclopédieJur/Abusdedroit.html