Littérature de jeunesse en anglais : Andrew Lang, Princesse Personne/Le secret trahi

Une page de Wikiversité, la communauté pédagogique libre.
Chapitre 6 : Le secret trahi
bouton image vers le chapitre précédent L'oiseau bleu




Alors ils décollèrent et volèrent, volèrent, tout un jour, toute une nuit et le lendemain ils atteignirent une charmille verte peuplée de Fées, de Papillons et de tous petits êtres étranges.
Et là, son abondante chevelure blonde étalée autour d'elle, se trouvait la Princesse Niente. Alors le Prince Charmant déposa sa couronne à ses pieds, posa un genou à terre et offrit à la Princesse de devenir son amour et sa dame. Elle ne le refusa point et ils se marièrent dans l'Église des Elfes et le ver luisant envoya toutes ses torches lumineuses et toutes les clochettes des fleurs se mirent à carillonner gaiement.
Peu de temps après ils se mirent en route pour rejoindre le Roi et la Reine.

Et voici la Cour de la Fée des Eaux
où Nymphes et Sirènes jouent de concert.

Maintenant que le Prince avait retrouvé la Princesse, vous pensez probablement qu'il n'avait plus qu'à rentrer pour retrouver le Père et la Mère de la Princesse qui se faisaient tant de souci en attendant des nouvelles. Tous les jours, ils montaient sur la guérite du château pour surveiller la plaine, dans l'espoir de voir un nuage de poussière sur la route et un Prince courageux ramenant leur fille. Mais leur attente était vaine, et leurs cheveux blanchissaient de tristesse et de vieillesse. Les parents des Princes qui étaient tous endormis sous le Champignon s'inquiétaient également, craignant qu'ils aient été faits prisonniers ou peut-être même dévorés par un Géant.

Pendant tout ce temps, la Princesse Niente et le Prince Charmant s'attardaient au pays des merveilles, trop heureux de la compagnie des fleurs, des ruisseaux et des Fées pour s'en éloigner.

Le fidèle Scarabée Noir avait beau murmurer régulièrement à l'oreille du Prince qu'il était temps de rentrer, le Prince ne portait pas plus d'attention aux conseils de son allié que s'il avait été une boucle d'oreille.

Et donc, dans cette Vallée Magique, le Prince et la Princesse auraient pu continuer à flâner indéfiniment si un triste incident n'était pas arrivé.
La nuit de leur mariage, la Princesse avait dit au Prince :
– Vous pouvez m'appeler Niente ou me donner tous les petits noms que vous voulez, mais jamais mon vrai nom.
– Mais je ne le connais pas, Dites-le moi !
– Jamais, vous ne devez jamais essayer de le connaitre.
– Et pourquoi donc ?
– Quelque chose de terrible se passera si vous trouvez mon nom et m'appelez ainsi.
Et on aurait dit qu'elle était vraiment en colère.

Mais à partir de ce moment-là le Prince n'eut de cesse de deviner le vrai nom de son épouse, et cela finit par le rendre très malheureux. Il essayait de la prendre au dépourvu et lui demandait :
– Est-ce Marguerite ? Est-ce Jeanne ? Est-ce Dorothée ? Ce n'est pas Sybille, n'est-ce-pas ?
Mais elle refusait de répondre.

Or il arriva un matin que la Princesse se réveilla de bonne heure, tellement heureuse qu'elle n'arrivait plus à dormir. Elle resta allongée à écouter le chant des oiseaux et à regarder deux enfants, l'un taquinait un oiseau qui, d'après le petit, chantait faux et l'autre se laissait porter par une mouche.

Croyant le Prince profondément endormi, elle se mit à fredonner doucement une petite chanson qu'elle avait composée pour lui et elle. Elle ne lui en avait jamais parlé, en partie parce qu'elle était timide, mais aussi pour une autre raison. Elle se mit à fredonner tout bas :

Main dans la main avec sa Gwendoline,
Tant que nos mèches seront blondes,
Il voyagera dans les forêts tout de vert habillées
Et parmi les jardins anciens ;
Puis, lorsque, pareils aux feuilles qui jaunissent,
Notre or blanchira,
Alors, main dans la main avec sa Gwendoline
Il s'éteindra et disparaitra.

– Oh, Gwendoline, c'est ça votre nom ? lui demanda le Prince.
Il était bien réveillé, avait écouté toute sa chanson et il éclata de rire de bonheur d'avoir découvert son secret.
Il essaya de l'embrasser.

Mais la Princesse devint froide, toute froide, et blanche comme du marbre, et le Prince se mit à trembler de tous ses membres et alla s'asseoir sur un Champignon renversé et au même instant, tous ses cheveux disparurent, de même que ses vêtements splendides, sa traîne dorée et sa Couronne. Il portait maintenant un bonnet rouge et ses vêtements d'avant, il était redevenu le Prince Ridicule. La Princesse se leva et disparut en un instant.

Voici le pauvre Prince désespéré, en pleurs,
et la Princesse s'éloigne et disparaît.